lundi 9 septembre 2013

ÉLECTION DE 2014 : Qui devra être le prochain président?

L'élection présidentielle devrait permettre à l'Algérie d'avoir les réponses à ses multiples questions

Cette échéance devrait être un moment opportun pour les intellectuels algériens de poser les bonnes questions afin d'appeler les bonnes réponses pour notre pays qui mérite beaucoup mieux.
Sous l'effet des bouleversements, incessants depuis la fin du XXe siècle, notre monde change de plus en plus vite et de plus en plus profondément. Sommes-nous aptes à faire face à ces changements? Une telle adaptation est pourtant aussi nécessaire qu'inévitable et elle se pose comme véritable problème d'actualité pour notre pays.
Au risque de choquer certains, les principes sur lesquels reposait notre politique nationale ne sont plus valables alors que ceux qui commandaient notre politique internationale sont rendus moins efficaces et moins efficients par les perturbations et les évolutions, souvent provoquées, qui surviennent dans l'environnement externe des sociétés et des nations.
C'est dans ces conditions qu'arrive l'élection 2014. Une élection qui devrait permettre à l'Algérie d'avoir les réponses à ses multiples questions. Au lieu de déclencher des guerres tribales au sein du FLN, RND et autres partis, comme il nous a été donné de le constater, cette élection devrait être un moment serein au cours duquel une réflexion patriotique (pas au sens du bas militantisme, ni celui du ventre) autour du devenir du pays. Au lieu de focaliser la lumière sur qui serait le plus apte à applaudir, à danser autour du feu des prétentions illégitimes, ou à faire les deux à la fois, l'élection de 2014 devrait être un moment opportun pour les intellectuels algériens de poser les bonnes questions afin d'appeler les bonnes réponses pour notre pays qui mérite beaucoup mieux. L'Algérie n'est pas bien! Qu'on cesse, de grâce, de nous déverser des balivernes à tout bout de meeting indécent. Elle ne l'est ni sur le plan interne ni sur celui externe.

La démocratie
Sur le plan interne, et après une interminable ère de parti unique, tout le monde avait cru, il faut le reconnaître, que les événements d'octobre 1988 allaient pousser au changement, mais, avec du recul, on constate que rien n'a réellement changé. Quelques noms sont venus agrandir la liste des partis du pays sans changement réel de la scène politique. Des partis dont beaucoup ne sont là que pour l'ameublement démocratique. A un moment où la démocratie, du moins du point de vue théorique, constitue le modèle d'organisation adulée par tous les peuples, y compris le nôtre, qu'avons-nous fait pour la promotion de la démocratie chez nous? Quelles sont donc nos réalisations démocratiques, à part les institutions mises en place, il faut le rappeler, par Boumediene, mais dont les mécanismes continuent toujours à être décriés par ceux-là mêmes qui y siègent et qui crient à la fraude chaque fois qu'il y a élection? Peut-on donc continuer à jouer sur le système d'autopoïèse pour faire semblant? Peut-on continuer à miser sur la démocratie de façade, comme on l'appelle généralement, afin de maintenir en place un système agonisant? C'est là la première question que devraient poser nos intellectuels et à laquelle devra impérativement répondre le futur candidat à la présidence. Une question qui se pose avec d'autant plus d'acuité qu'un système qui vieillit a toujours tendance à partir à la dérive et à tendre vers l'amuïssement.

L'enseignement
Sur le plan interne encore, il est temps de se demander ce qu'on a réalisé dans le domaine de la connaissance en ce début de siècle qui consacre l'économie de la connaissance et en fait la clé de tout développement. Notre université, notre école, notre philosophie du savoir sont entièrement mises à plat par ceux-là mêmes qui étaient chargés de les propulser et d'en promouvoir le développement. Le décalage béant entre la formation qu'assurent nos établissements et les besoins de notre marché n'a d'autre explication que l'inadéquation de cette formation et la non-prise en considération de notre réalité. Doit-on continuer à former pour former? Doit-on continuer à former pour mitrailler les instances internationales de chiffres éloquents? Doit-on former pour bomber le torse en récitant les chiffres et leur évolution ou bien doit-on former pour assurer un meilleur avenir aux générations futures? Quel sera le devenir de notre université? Comment devra-t-on la concevoir? Quelle sera sa place dans la hiérarchie mondiale? Comment devra-t-on repenser l'Ecole algérienne? En d'autres termes, quelle sera notre stratégie pour l'enseignement dans l'avenir? Là est la seconde question que nous avons à poser et à laquelle devra sans doute répondre le prochain président.

La hiérarchie des objectifs
Sur le plan interne toujours, et après avoir perdu le sens de la hiérarchisation des priorités pendant plus de trente ans, on constate avec beaucoup de tristesse que le football est devenu chez nous plus important et plus préoccupant que le développement du pays. Notre pays est en train de supporter à coups de milliards l'ambition, non prioritaire cependant, de se hisser parmi le gotha mondial du football, alors qu'on oublie de trouver du travail aux jeunes, de construire des logements aux plus démunis, de produire comme tous les autres pays de quoi nous nourrir et nous soigner. Nous ne sommes pas contre le développement du football, loin de nous cette idée, mais nous ne pouvons accepter qu'on en fasse la préoccupation centrale d'un pays. Notre pays ne doit pas vivre au rythme des rencontres de football, mais à celui des inventions industrielles et technologiques. Peut-on nous compter nos réussites économiques? Et nos réussites industrielles? Même les usines qui ont été construites après beaucoup de privations ont été bradées au profit de particuliers et d'un capital privé algérien sur lequel planent, pour une bonne part de ce capital, en tout cas, beaucoup de doutes. Comment allons-nous concevoir notre industrie et notre appareil de production? Comment comptons-nous attirer les investissements étrangers? Comment espérons-nous bénéficier de l'expérience de nos partenaires étrangers?
Dans le domaine de l'agriculture aussi, beaucoup de questions se posent. Les constructions anarchiques ont rongé les terres arables agricoles pour en faire des affaires de production ou de services. Quand va-t-on arrêter ce massacre des terres qui, déjà, ne nous suffisent pas. Comment devra-t-on intéresser nos agriculteurs pour pouvoir développer ce secteur? Quel modèle de développement devra-t-on choisir pour notre secteur agricole? Quelle sera sa part dans la couverture de nos besoins nationaux? Dans nos exportations? En d'autres termes, quelle stratégie de développement devrons nous mettre en place pour l'avenir? Telle est la troisième question à laquelle devra apporter une réponse notre prochain président.

La jeunesse
Toujours sur le plan interne, la jeunesse ne sait plus quoi faire de son temps. Sans travail, sans logement, donc sans revenu et sans famille, nos jeunes doutent de leur avenir et, ce faisant, ils ne peuvent que douter de leurs compétences. Comment ne pas douter alors qu'ils sont déçus par l'école, les parents, la société qui leur ont toujours menti. N'est-ce pas que nous leur disions d'aller à l'école pour assurer un meilleur avenir? Une fois qu'ils ont écouté nos conseils, ils se retrouvent dans la rue, qui après 17 ans d'études, qui après 18 ans de peine, qui après 20 ans de tracas. Est-ce normal que nous ayons ce comportement à l'égard de notre jeunesse? une jeunesse oubliée dont une partie part chaque jour que Dieu fait à l'aventure par la mer vers des rivages qui ne peuvent être meilleurs car sur d'autres pays que le leur. Mais que doit-on faire pour retenir nos enfants? Que doit-on faire pour les intégrer au développement du pays? Quelle est leur place dans notre stratégie de développement future? Telle est la quatrième question à laquelle devra répondre notre prochain président.

Notre place sur l'échiquier mondial
Sur le plan externe, l'Algérie, il faut en convenir, a cessé d'être un modèle pour les pays du tiers-monde, elle a cessé d'être «la Mecque des révolutionnaires» et elle n'est plus un modèle en diplomatie. Sommes-nous un acteur crédible sur le plan mondial? Sur le plan régional? Comment nous regardent les autres? Les questions à poser et les réponses à y apporter sont aussi importantes qu'urgentes.
Après la période de bipolarité (Urss-USA) qu'a vécu le monde avec, notamment sa Guerre froide, nous avons connu une autre période avec l'écroulement programmé du bloc soviétique et l'émergence d'un monde unipolaire qui a vu une certaine hégémonie américaine... Beaucoup de pays qui se disaient proches des Russes et des Soviétiques ont alors préféré nouer des relations avec les Américains, les puissants du moment. Le mouvement du tiers-monde si cher à Boumediene a perdu alors sa place depuis. Aujourd'hui, nous nous acheminons vers une autre ère, celle qui est en train de prendre forme ces tout derniers jours avec la montée en puissance d'une Russie qui veut reprendre sa place de puissance mondiale. La question syrienne en démontre l'intention et la ferme volonté. Dorénavant, le monde ne sera plus comme avant. Quelle sera notre positionnement dans la nouvelle configuration mondiale? Vers quelle philosophie pencherons-nous? La Chine avance, de son côté, à pas fermes et à coups de réalisations économiques et technologiques, sur un marché mondial qui s'est avéré plus grand qu'on nous l'enseignait à l'université, plus féroce et, surtout, plus inhumain. De leur côté, les pays du Brics assoient et consolident de plus en plus leur position dans le concert des nations, à côté d'autres nations qui ont su profiter des longues années de la vanne pétrolière. Quelle sera notre positionnement dorénavant sur le plan mondial? Et dans quel but devrons-nous opter pour tel ou tel camp plutôt que vers tel autre? Notre proximité de la culture française devra-t-elle nous maintenir dans la zone d'influence de ce pays ou est-ce que la lourdeur de notre passé commun devra plutôt nous obliger à nous en éloigner pour le bien de tous? Et quel rôle devrons-nous avoir à l'avenir? En d'autres termes, où voulons-nous nous situer dans l'échiquier mondial? Telle est la cinquième réponse à laquelle devra apporter réponse le futur président.

Notre force
Au lieu de se focaliser sur le positionnement de notre football, simple moyen de divertissement passager, l'Algérie doit veiller d'abord à cultiver l'ambition de se hisser parmi les puissance mondiales. On nous dit puissance régionale et cela nous met un peu de baume sur le coeur, mais nous sommes-nous posé la question de savoir en quoi nous sommes une puissance régionale? Puissance économique? Puissance militaire? Puissance démographique? Et quelle puissance voudra s'imposer l'Algérie dorénavant?
L'Algérie n'est plus dans cette région pacifiée qu'elle avait par le passé. La Tunisie, la Libye, le Mali, le Niger, la Mauritanie et le Maroc malgré ces petits problèmes de voisinage et ses sursauts d'humeur. Aujourd'hui, nous avons un Maroc qui sort les crocs, un Mali en pleine période de problèmes, une Mauritanie à l'environnement qui évolue difficilement à cause des groupes armés qui, de temps en temps, apparaissent, une Libye qui repose sur une poudrière, une Tunisie fortement instable, un Sahara occidental sous occupation et un Niger aussi instable que le Mali. L'Egypte, autre partenaire important, est en voie de connaître des moments des plus difficiles. Dans un tel environnement, que pouvons-nous et que devons-nous faire? Sommes-nous toujours crédibles au regard de nos voisins? Que signifie désormais le Maghreb arabe? Que signifie la Ligue arabe? Et quel sens donner désormais à l'Afrique? Autrement dit, quelle vision devons-nous avoir désormais pour notre environnement immédiat qu'est le Maghreb? L'Afrique? Le Monde arabe? Et quelle vision développerons-nous pour le monde musulman? Et pour les pays en voie de développement? Autant de questions auxquelles devrait répondre le prochain président.
Les bouleversements qui ont secoué le Monde arabe et ceux qui secouent ces jours-ci la planète entière ne peuvent être ignorés. La politique de distribution des milliards à tout-va, le vent ne suffit plus à maintenir le cap. Le pétrole menace de tarir un jour ou l'autre et les pays qui maîtrisent mieux que nous loutil technologique refusent d'exploiter leur gaz de schiste alors que nos parlementaires ont, parait-il, opté pour que cela se passe chez nous. Sait-on où on va? Vers quel port devra nous mener notre prochain président? Telle est la question à laquelle chacun de nous devra apporter la réponse parce que de cette réponse et de toutes les autres, nous saurons dire qui devra être notre prochain président.

L'Expression

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