Une nouvelle étape
Un regard croisé de la nouvelle génération des deux pays :
L'engagement que porte l'Association "Maison de l'Algérie" auprès des jeunes français et algériens pour une connaissance réciproque et une compréhension mutuelle de la relation d'exception entre la France et l'Algérie en vue d'un partenariat durable. www.maisondelalgerie.org
A retenir. À l’issue de la victoire retentissante du Rassemblement national (RN) aux élections européennes, le président français Emmanuel Macron a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale.
Par fatih / Adobe Stock
Des élections législatives anticipées sont
programmées pour le 30 juin prochain. Les partis politiques ont déjà
entamé leur campagne. Un responsable du RN a annoncé, ce lundi, que son
parti veut réviser les Accords de 1968 avec l’Algérie.
Pourquoi c’est important. Fondé
par Jean-Marie Le Pen, un ancien militaire accusé de torture durant la
guerre d’Algérie, le Rassemblement national (RN) est un parti
ouvertement hostile à l’Algérie et aux Algériens.
Ses responsables, dont Marine Le Pen, font
régulièrement des déclarations hostiles aux Algériens. La probable
arrivée au pouvoir du RN, à l’issue des législatives anticipées du 30
juin, va créer des tensions avec l’Algérie, sur plusieurs sujets, dont
l’immigration.
Les faits. Ce dimanche 9
juin, les électeurs français ont voté pour élire leurs représentants au
Parlement européen. Les résultats ont eu l’effet d’un séisme politique
en France.
Alors que la liste de la majorité
présidentielle menée par Valérie Hayer a réalisé un score médiocre
(14,6 % des suffrages exprimés), le RN, parti d’extrême-droite, dirigé
par Jordan Bardella, est arrivé largement en tête en recueillant près de
31,36 % des voix.
Le RN veut abroger les accords franco-algériens de 1968
Au lendemain de l’annonce de la dissolution
de l’Assemblée nationale et des législatives anticipées, le RN et les
autres partis sont déjà en campagne. Sans surprise, le parti
d’extrême-droite attaque sur l’immigration, en particulier les accords
franco-algériens de 1968.
Intervenant, ce lundi matin, sur le plateau de BFM TV,
le porte-parole du Rassemblement national Sébastien Chenu promet, si
son parti remporte les législatives, de remettre sur la table la
proposition d’abrogation des accords qui lient la France à l’Algérie,
régulant le séjour des Algériens en France.
« Sur le dossier OQTF, nous proposons d’abroger les accords de 1968 qui nous lient à l’Algérie. Ces accords n’ont aucune raison d’être aujourd’hui », a déclaré l’intervenant.
Le parti extrémiste compte, en effet, remettre en discussion ces accords « de façon à ce qu’ils ne soient plus dérogatoires du droit de l’immigration », précise-t-il, soulignant que cela « devra permettre à l’Algérie de reprendre un certain nombre de ses ressortissants ».
En décembre dernier, la désormais
ex-Assemblée nationale française avait dit non à la proposition pour
mettre fin à ces accords, défendue notamment par les Républicains et le
RN.
Marion Maréchal tend la main au Rassemblement national pour une alliance
Concernant les élections européennes, la
tête de liste de Reconquête, Marion Maréchal, qui a franchi le seuil des
5 % nécessaires pour obtenir au moins quatre sièges au Parlement
européen, a réitéré sa volonté de former une « coalition des droites », avec le Rassemblement national.
Elle a, en effet, déclaré être disposée à « rencontrer Marine Le Pen et Jordan Bardella » en vue des prochaines législatives. Évoquant une « poussée inédite du Rassemblement national », elle s’est félicitée que « le bloc national (de droite) atteigne 40 % », rapporte le journal les Échos.
« J’ai toujours distingué les adversaires des concurrents et refusé de concentrer mes attaques sur le RN »,
a-t-elle déclaré en présence d’Éric Zemmour. Le parti Reconquête est
également connu pour ses positions hostiles à l’Algérie et aux
Algériens.
Les troubles qui ont embrasé des villes à travers la France ont pris la forme de l'une des manifestations de justice sociale les plus importantes du pays depuis des années, voire des décennies.
Pendant plus de six jours, de nombreux Français se sont endormis sous les sirènes, les coups de feu et les feux d'artifice, et se sont réveillés avec des voitures carbonisées, des magasins pillés, des mairies et des écoles incendiées.Les maisons des maires ont été attaquées.
Tout le monde, des politiciens aux footballeurs français, a appelé au calme.Le gouvernement a déployé 45 000 policiers chaque nuit depuis vendredi pour réprimer la violence.
Des manifestations et des émeutes ont éclaté dans toute la France après que la police a tué un adolescent d'une communauté immigrée la semaine dernière.Les troubles ont été un point de basculement pour les groupes minoritaires de France, qui se sont longtemps sentis poussés à la marge.
Lundi, les émeutes avaient largement diminué.Pourtant, un message de trois mots griffonné sur les murs à travers le pays pointe vers une colère qui n'a pas existé : justice pour Nahel.
Nahel, un adolescent franco-algérien dont le nom de famille n'a pas été rendu public, avait 17 ans lorsqu'il a été tué par un policier mardi dernier lors d'un contrôle routier.L'interaction a été filmée par un spectateur et a depuis apporté un jugement à l'échelle nationale.
Il s'agit d'une loi de 2017 qui donne aux policiers une plus grande autorité pour recourir à la force.Les militants disent que cela a considérablement augmenté le nombre de fusillades mortelles lors des arrêts de la circulation.Plus largement, la mort de Nahel est la dernière d'une série de points d'éclair allumés par des allégations de racisme endémique dans la société française contre les minorités ethniques.En particulier dans les banlieues mal desservies de Paris connues sous le nom de banlieues, les groupes minoritaires et les immigrés se sont longtemps sentis marginalisés et discriminés par l'État.Les émeutes qui ont suivi la mort de Nahel ont porté un message clair, en particulier parmi les jeunes français : pas plus.
« La dignité est vraiment au cœur de ce qui se passe », explique Mounira Chatti, professeur à l'Université Bordeaux Montaigne qui étudie l'intégration.« En ce moment, ces jeunes se sentent discriminés à l'école, au travail.... Ils sont victimes de profilage racial par la police.
« Si nous voulons sortir de cette situation, le gouvernement doit envoyer un signal très fort aux jeunes issus de l'immigration : vous appartenez à ce pays ;vous avez votre place ici.
Échos du passé
De nombreux observateurs ont comparé la situation à 2005, lorsque deux adolescents ont été électrocutés alors qu'ils se cachaient de la police dans une sous-station électrique de la banlieue parisienne de Clichy-sous-Bois.Leur mort a déclenché une vague d'émeutes qui a duré trois semaines et coûté à l'État environ 200 millions d'euros (218 millions de dollars).
Pour ceux desbanlieuesimmigrées , la mort de Nahel indique un manque marqué de progrès.
« Depuis 2005, rien n'a changé !La police cible toujours nos enfants dans lesbanlieues.C'est intolérable », déplore Laurence Bedé, franco-algérienne mère de trois filles vivant dans une banlieue proche de Nanterre, où elle est venue assister à une marche pour Nahel jeudi dernier.
« Nous en avons marre », dit sa fille adolescente Maissane, fondant en larmes."Nous voulons juste qu'on nous donne une chance."
Le gouvernement français a nié le racisme dans sa police.Mais un rapport de janvier 2017 de Jacques Toubon, défenseur indépendant des droits de l'homme en France, a montré que les hommes maghrébins et noirs étaient 20 fois plus susceptibles d'être arrêtés par la police que le reste de la population.
En février 2017, en réponse à la pression du public pour qu'il paraisse dur face au crime et au terrorisme, le gouvernement a adopté une loi offrant aux policiers plus de droits d'utiliser leurs armes de service.Auparavant, la police devait justifier la légitime défense.La nouvelle loi leur permet de tirer sur les automobilistes qu'ils considèrent comme une menace potentielle pour le grand public.
Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a déclaré que la loi n'avait pas affecté le comportement des officiers.Mais les données compilées par les chercheurs montrent que les fusillades mortelles lors des contrôles routiers ont été multipliées par six depuis 2017. Rien qu'en 2022, 13 fusillades mortelles ont été enregistrées – un nombre inouï en France – dont trois cette année.Ces chiffres sont indépendants de toute augmentation globale de la criminalité.
"Nous avons constaté un effet massif et incontestable de la loi de 2017", déclare Sebastian Roché, expert policier au Centre national de la recherche scientifique, qui faisait partie de l'équipe de recherche sur les violences policières.
La loi a été votée le 28 février 2017 et dans l'année qui a suivi, cinq automobilistes ont été tués par la police, raconte M. Roché.Au cours des cinq années précédentes, ce nombre était de zéro.
"C'étaient les mêmes policiers avec les mêmes armes", ajoute M. Roché."La seule chose qui a changé, c'est la loi."
Les responsables du syndicat de la police française n'ont pas pu être joints pour commenter, mais M. Roché affirme que la loi ne laisse pas de temps pour la formation.Et il pointe d'autres tendances préoccupantes au sein de la police française.Indépendamment de la loi de 2017, un rapport de 2022 de l'auditeur public français, la Cour des comptes, a montré que 40% des officiers n'avaient pas suivi leur formation de base au tir requise.
Les racines de la méfiance
Les groupes minoritaires desbanlieuesexpriment depuis longtemps une profonde méfiance à l'égard de la police.L'officier qui a tiré sur Nahel a d'abord suggéré que l'adolescent se dirigeait vers lui, posant une menace immédiate.Mais la vidéo publiée en ligne le montrait en train d'interroger Nahel à la fenêtre du côté conducteur avant que Nahel ne s'enfuie.L'agent a depuis été inculpé d'homicide volontaire.
Cara Anna/AP
« La vidéo est un élément très important dans tout cela. Normalement,
vous avez plusieurs versions d’événements qui se contredisent, mais
avec cet incident, ce n’était pas possible », explique Julien Talpin,
sociologue au Centre national de la recherche scientifique. « Cela a
laissé l'indignation de s'édifier. Les jeunes dans les banlieues en
difficulté ont déjà l'impression que la police tue et mensonge, mais
maintenant elles en ont la preuve. »
Cette méfiance est en train de s'ébuller.
«
Ces jeunes émeutes ont vu leurs parents, leurs frères et sœurs plus
âgés faire l’objet de discriminations à maintes reprises, et ils en ont
assez », explique Naima Iratni, présidente de la Maison d’Algérie, une
organisation à but non lucratif basée à Paris qui promeut la coopération
entre les jeunes en France et en Algérie. « Cette génération – elle a
entre 14 et 18 ans – dit : « Arrêtez. Ils ne l'accepteront plus. »
Mme.
Iratni dit qu'une grande partie de la discrimination à l'encontre des
jeunes d'Afrique du Nord et d'Afrique subsaharienne de deuxième et de
troisième génération est le résultat de l'incapacité de la France à se
débarrasser des voies coloniales : « Maintenant, le colonisateur
colonise chez lui plutôt qu'à l'étranger. »
Objets, pas sujets
De nombreuses études
ont montré que les groupes de minorités visibles sont confrontés à plus
de discrimination dans les écoles françaises que les autres élèves,
discrimination qui les suit sur le lieu de travail. Une étude de 2020 a
révélé que les candidats portant des noms arabes avaient 25 % moins de
chances d'obtenir une réponse positive lors d'une recherche d'emploi.
« Ces jeunes Arabes et Noirs sont toujours l’objet du discours public
et non les sujets », explique Mme. Chatti. « Ce dont ces jeunes ont
besoin à l’heure actuelle, ce sont des intermédiaires qui peuvent
raisonner avec eux. Ils ne veulent pas écouter le gouvernement ».
La
France a dû faire face périodiquement à de telles questions
existentielles sur l'identité et l'intégration nationales. En 2018,
l’ancien ministre centriste Jean-Louis Borloo a produit un rapport
ambitieux de 60 pages sur la manière de restructurer et de revitaliser
les banlieues en difficulté de
France. Mais le rapport a été largement ignoré, et de nombreux experts
disent que les troubles d'aujourd'hui ont un lien direct avec l'échec du
gouvernement à mettre en œuvre M. Les recommandations de Borloo.
Jeudi, les hommes politiques du parti d'extrême-gauche La France
Insoumise ont proposé une première étape différente. Ils ont présenté
des projets de loi qui aboliraient la loi policière de 2017 et,
peut-être, fourniraient un sens de la justice.
« Je regarde ce
qui est arrivé à Nahel et je pense qu’il aurait pu être mon petit frère
», explique Ben Abdallah Adem, un adolescent de la banlieue parisienne. «
Il n’y a plus de respect quand il s’agit de la manière dont la police
nous traite. Quand ils nous arrêtent, c'est plus dur que jamais. Je veux
juste que la police offre un sentiment de protection. Nous ne devrions
pas avoir peur de ceux-ci ».
C’est avec une grande fierté que je salue le communiqué du ministère
des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger suite
à la tragédie qui a frappé de plein fouet une famille d’origine
algérienne et la communauté algérienne établie en France. Mes très
sincères condoléances à la famille du défunt Naël. A Dieu nous
appartenons et à Lui nous retournerons.
Cette prise de conscience que véhicule ce communiqué m’incite à vous
interpeller sur le souhait fort de notre jeunesse binationale d’avoir un
espace favorable pour contribuer au développement économique de sa
chère patrie, l’Algérie.
L’association Maison de l’Algérie a pu prouver par son action «Pont
d’intelligence, génération entrepreneurs en Algérie» que cette jeunesse
peut déclencher une dynamique constructive : flux d’idées, de projets,
d’échanges d’expériences et de créations d’emplois.
Ce savoir-faire, qui a été présenté au ministère de l’Economie de la
connaissance, des Start-up et des Microentreprises, malheureusement, n’a
pas eu d’écho.
C’est pourquoi je sollicite de votre haute bienveillance d’ouvrir un
espace à notre projet «Génération entrepreneurs en Algérie» afin que
nous contribuions ensemble à la consolidation de la «Nouvelle Algérie».
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l’expression de ma haute considération.
Emmanuel Macron lors de sa visite à Alger en campagne à la présidentielle française
Cinquante années d'une relation en mouvement pendulaire oscillant entre l'étreinte et la bouderie. Mais il faut bien que le pendule s'arrête un jour pour entamer enfin une trajectoire rectiligne.
Pendant un demi-siècle de passions et de relations tumultueuses marquées par le saut de l'incompréhension, l'Algérie et la France restent toujours dans une posture de méfiance où les scories du passé brouillent la vision et faussent les perspectives. La formule du président Boumediene cernait cette situation par cette tirade: «Les relations entre la France et l'Algérie peuvent être bonnes ou mauvaises, elles ne peuvent être banales.» L'Algérie parle des «occasions manquées» par une France, figée dans un esprit de domination hérité du passé, qui n'avait pas su établir une «coopération exemplaire». Depuis la solution d'une République algérienne biethnique proposée en 1946 déjà par Ferhat Abbas à l'option d'alliés tragiques avancée par Krim Belkacem en 1962, au partenariat d'exception signé en 2012 entre l'ex-président François Hollande et son homologue Bouteflika en passant par le traité d'amitié âprement défendu par l'ex- président Jacques Chirac, que d'occasions perdues ou même refusées! Que d'énergie inutilement gaspillée! Cinquante années d'une relation en mouvement pendulaire entre l'étreinte et la bouderie. Mais il faut bien que le pendule s'arrête un jour pour entamer enfin une trajectoire rectiligne. L'arrivée d'Emmanuel Macron au pouvoir en France marque une profonde rupture non seulement à l'Hexagone, mais aussi dans les rapports entre Alger et Paris. Le jeune président incarne la France nouvelle. Il ne traîne pas le lourd boulet d'une histoire partagée et son approche marque un «désenclavement» des rapports longtemps crispés. Les problèmes ont changé de nature. Aujourd'hui, entre Alger et Paris, il n'y a plus de contentieux grave, de désaccords sérieux. Les relations sont sorties de la zone des tempêtes. Un nouveau souffle, une nouvelle époque. Il reste à décrypter et donner du sens aux autres changements qui surviennent chez le partenaire français. Quels seront les nouveaux rapports avec la France nouvelle? Comment restaurer un socle commun qui autorise les échanges? Les perspectives de vraies retrouvailles sont réelles puisque la génération Macron a aseptisé le terrain, le rendant plus apte pour une amitié retrouvée. Les bruyantes mésententes, des coups tordus, les tractations secrètes, les traités d'amitié avortés, le poids de la mémoire et les derniers débris de cette méfiance emporté par le ressac de la vague macronienne. Le président Français sera demain en visite officielle à Alger, dans une totale, sérénité. Les échos parvenant de l'Hexagone le confirment. «Avec l'Algérie, il n'y a pas de tiraillement, la relation est très bonne, étroite, constante», explique-t-on à l'Elysée. Désormais, dit-on encore à l'Elysée, «l'idée, c'est maintenant de tourner la page». «Il a dit (le président Macron, Ndlr) les choses, les choses sont très claires, ça a été très apprécié par les Algériens (...) mais là, aujourd'hui, l'idée du président, c'est de tourner la page et de construire de nouvelles relations avec l'Algérie.» «L'Algérie a vocation à occuper une place importante, une place de passerelle, à la jonction entre les deux continents». Cette «visite de travail et d'amitié» sera suivie d'un Conseil intergouvernemental de haut niveau, jeudi à Paris, présidé par les deux Premiers ministres. Une sérieuse option de salut pour passer aux vrais problèmes. L'Algérie souhaite diversifier son économie, fragilisée par la baisse du cours du pétrole, tandis que la France affronte une sérieuse concurrence des Chinois. Mais le terreau existe: près de 30.000 Français vivent en Algérie dont plus de 90% sont des binationaux et le nombre d'Algériens en France avoisinerait les 3 millions de personnes. A cela s'ajoutent les liens linguistiques puisque près de 11 millions d'Algériens parlent la langue française, et des liens historiques, sans compter la proximité géographique. Aux pires moments, au paroxysme de la tension, il se trouvera toujours de bonnes volontés de part et d'autre pour indiquer la voie positive. Toute la singularité des relations entre les deux pays réside dans ce cordon social. Reste la question de la mémoire, elle est la conscience de la République française. C'est à elle de décider ou non d'examiner l'histoire avec ou sans lunettes tricolores.
Emmanuel Macron ne va pas rencontrer la société civile. Les autorités algériennes n’ont pas accédé à son souhait.
La visite du président de la République française en Algérie, Emmanuel Macron, qui charriera, à coup sûr, son lot de commentaires et d’expressions passionnés, comme cela a toujours été le cas avec les séjours des chefs d’État de l’Hexagone à Alger, a plus l’allure d’une escale politique que d’une visite d’État. Le patron de l’Élysée passera moins de temps dans la capitale algérienne, où il est attendu le 6 décembre prochain, que le candidat Macron : tout juste une demi-journée et, donc, un agenda serré pour ne pas dire réduit au plus important. Emmanuel Macron devra arriver à Alger au milieu de l’après-midi, vers les 15 heures, apprend-on de bonne source. Il décollera vers le Qatar aux environs de 22 heures, après une audience que lui accordera le président de la République Abdelaziz Bouteflika. Dans l’intervalle, le président français aura une entrevue avec le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, au Palais du gouvernement. Une rencontre durant laquelle il sera question, entre autres, de la réunion de la Commission mixte de haut niveau, qui s’ouvrira le jeudi 7 décembre, soit le lendemain, à Paris, et que coprésidera Ahmed Ouyahia. Il est fort peu probable que les deux hommes abordent la question de la mémoire, un sujet, faut-il le rappeler, qui non seulement déchaîne les passions mais fâche souvent. C’est plutôt la coopération économique, les possibilités de partenariats gagnant-gagnant, formule que les officiels algériens aiment à répéter, qui domineront les discussions. Le président français, qui a souhaité disposer d’une tribune pour un échange politique hors séances protocolaires, devra se contenter d’une réunion consacrée au secteur de l’industrie. Le souhait de Macron de rencontrer la société civile ne sera pas exaucé. Les autorités algériennes n’ont pas accédé à cette demande. Le refus algérien serait inspiré, nous confie une source diplomatique, par la polémique toute fraîche qu’a suscitée le débat du président français avec les étudiants burkinabé à Ouagadougou. Cependant, le locataire de l’Élysée ne devrait pas quitter Alger sur les seuls rythmes protocolaires. Il est prévu, au cours de sa visite, un bain de foule sur un itinéraire aussi long que symbolique : la Grande- Poste-Place Audin. Cette immersion dans le cœur d’Alger, Macron la fera en compagnie du wali, Abdelkader Zoukh, et du président de l’Assemblée populaire communale d’Alger-Centre, Abdelhakim Bettache, heureux édile, à l’occasion des récentes élections locales. Au regard du menu de la visite de Macron, il n’y a pas de place aux dissertations politiques, lesquelles, si elles devaient avoir lieu, ne pourraient zapper la question de la mémoire. Un dossier sur lequel autant Alger que Paris avancent prudemment. L’opinion algérienne attend de Macron d’honorer sa promesse de campagne, lui, qui, candidat à l’Élysée, avait promis d’oser plus que ne l’ont fait ses prédécesseurs sur la reconnaissance du fait colonial. Président et confronté à la réalité du pouvoir et des exigences de la géopolitique, il semble peu enthousiaste à consentir plus qu’il n’a déjà consenti.
Le président français Emmanuel Macron a prôné une “réconciliation des mémoires”, rejetant “déni” et “repentance” pour la colonisation, dans un entretien à la chaîne TraceTV diffusé dimanche.
Interrogé à distance par une Française d’origine congolaise sur d’éventuelles mesures de “réparation”, le chef d’Etat français, qui vient d’effectuer une tournée en Afrique de l’Ouest et s’apprête à aller en Algérie, a estimé que “la réparation est mémorielle”.
“Cette jeune femme n’a pas vécu la colonisation, donc elle ne peut se construire sa vie, son projet de vie, la relation avec le pays où elle est, la France, avec ça. Je ne vais pas dire +la France doit verser un subside, ou reconnaître ou indemniser+, ce serait totalement ridicule. En termes de mentalité, ce n’est pas une façon de construire son avenir”, a lancé M. Macron sur TraceTV, chaîne en direction notamment de la jeunesse africaine, dans un entretien d’une heure enregistré jeudi à Accra au Ghana.
“Par contre, pour que (cette jeune femme) puisse pleinement se construire, avoir sa place, il faut qu’il y ait une réconciliation des mémoires, c’est ce à quoi je tiens beaucoup. C’est-à-dire que dans la mémoire française, dans l’histoire de la France, comme dans l’histoire de l’Afrique, on doit parler de ces pages noires, comme des pages glorieuses”, a ajouté le chef de l’Etat.
Il a cité en exemple le centre de mémoire sur la traite et l’esclavage ouvert en 2015 sur l’île de la Guadeloupe aux Antilles françaises qui, selon M. Macron, “a permis de reconnaître la mémoire de l’esclavagisme, la place que cela a eu en particulier dans les territoires d’Outremer français mais aussi sur tout le continent africain”.
“J’ai souvent dit: ni déni, ni repentance. Il faut regarder les choses en face, c’est notre histoire commune”, a-t-il ajouté, appelant à “regarder de manière très dépassionnée cette période”.
Et de conclure: “ce passé c’est notre viatique pour l’éternité, comme disait Jankélévitch. Mais ce qui compte, c’est notre avenir commun”.
Alors candidat à la présidentielle, Emmanuel Macron avait qualifié la colonisation de “crime contre l’humanité”, en février lors d’un voyage à Alger, déclenchant une polémique.