mercredi 10 octobre 2012

Crise : la responsabilité des politiques engagée


DÉCRYPTAGE - Le FMI est persuadé que la zone euro doit faire «un saut quantique» dans sa gouvernance : une plus grande solidarité financière, la mise en place d'une véritable union bancaire ainsi qu'une union budgétaire.

Quatre ans après la faillite de la banque Lehman Brothers, à l'automne 2008, qui a plongé les États-Unis et l'Europe, sinon le reste du monde, dans la crise la plus profonde depuis les années 1930, on craint à nouveau le pire. Car il ne faut pas être dupe du chiffre de croissance de 3,6 % que le FMI prévoit pour l'éco­nomie mondiale en 2013. Et les ­experts de Washington sont d'ailleurs les premiers à nous mettre en garde.
Ce chiffre est en effet assorti d'un degré d'incertitude exceptionnel. Selon leFMI, il y a aujourd'hui une chance sur six que la croissance mondiale tombe en deçà de 2 %. Et contrairement aux apparences cela signifierait en pratique une véritable récession économique pour le monde entier. Le taux 2 % constitue en réalité le seuil en dessous duquel il faut parler de recul.
Compte tenu de la croissance démographique et en raison des forces de rattrapage des pays en développement, l'activité économique de la planète doit progresser à ce rythme minimal. Sinon cela implique d'immenses difficultés. Pour les économies de la zone euro, un tel scénario de croissance à 2 % serait compatible par exemple avec une chute de PIB de l'ordre de 1,5 % à 2 %.
Que l'incertitude redevienne extrême, la volatilité des cours boursiers nous le rappelle chaque jour. Et dans le nouveau «World Economic Outlook» que le FMI publie deux fois l'an, ses économistes ont fait des calculs de probabilité sur les prix du pétrole à l'horizon 2015. Pour être sûr de ne pas se tromper, il faut envisager des cours du baril de brent entre 40 et 250 dollars. Le champ de ces possibles va d'une dépression économique, qui ferait plonger l'or noir à des niveaux sans précédent depuis 2008. Et à l'inverse il faut envisager des sommets totalement inédits, en cas de crise géopolitique essentiellement.

«Saut quantique»

Ce climat explique plus que tout mécanisme économique la crise de confiance des acteurs financiers, et ce qui est sans doute plus grave, des décideurs d'entreprise eux-mêmes. «Si l'incertitude pouvait être allégée, la reprise pourrait être bien plus forte que nous le prévoyons actuellement», fait observer Olivier Blanchard, le chef économiste du FMI.
De sa part, il ne s'agit pas d'un vœu pieux mais d'un appel lancé aux décideurs politiques. Et en premier lieu aux chefs d'État ou de gouvernement de la zone euro. Le FMI - ce n'est pas nouveau de sa part - est persuadé que la zone euro doit faire «un saut quantique» dans sa gouvernance: une plus grande solidarité financière, à travers le Méca­nisme européen de stabilité(MES) ; la mise en place progressive, mais sûre, d'une véritable union bancaire ; et last but not least, une union budgétaire, avec les responsabilités collectives, pour ne pas parler de la «perte de souveraineté», que cela implique.
Le monde politique américain également est concerné, lui qui ne parvient pas à se mettre d'accord sur une solution «transpartisane» aux déficits publics. Il est vrai que la période de la campagne électorale américaine 2012 n'est pas idéale à cet égard.
Une seule certitude dans ce paysage brouillé de l'économie mondiale actuelle, jamais la prospérité n'aura autant été dans la main des politiques. Mais n'en a-t-il pas toujours été ainsi? En démocratie, on a les dirigeants et la prospérité que l'on mérite.

Jean-Pierre Robin
Le Figaro

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