vendredi 5 avril 2013

L'UPM : EN QUÊTE DE DÉMOCRATIE

Un forum pour convaincre que la coopération ne se fera que dans un contexte démocratique. robert terzian

Un forum pour convaincre que la coopération ne se fera que dans un contexte démocratique. robert terzian


Révolutions arabes et crise dans les pays du nord de la Méditerranée ont mis à jour la défiance des peuples du pouvoir central. Une occasion de repenser la coopération décentralisée.

 Les bouleversements de ces dernières années, tant dans les pays du sud de notre espace commun que dans ceux du nord, frappés de plein fouet par une crise ont porté au grand jour les exigences de gouvernance démocratique des peuples. Autocrates déchus des pays arabes, dirigeants désavoués pour leurs politiques d’austérité et leur incapacité à mettre un terme à la souffrance de leurs peuples, obligent à repenser les formes de coopération jusque là en vigueur. Jean-Claude Tourret, délégué général de l’institut de la Méditerrannée en rappelait les vicissitudes, en introduction d’un forum réunissant des responsables de collectivités territoriales d’une dizaine de pays de l’espace méditerranéen. Complexité accrue des modes de coopération « Le recul des Etats, notre propension à imposer nos propres modèles économiques, qui ont montré leurs limites, des recettes institutionnelles » clé en main, ont consacré le peu d’envergure et d’utilité de ce type de coopération.« Il faut bien avoir conscience que les mécanismes de développement des pays qui ont émergé, ont été portés par leurs propres sociétés et qu’ils ont su mettre en place des programmes en harmonie avec leur référentiel. Les autres n’ayant connu qu’une croissance faible. La primauté doit donc être accordée à la dimension territoriale. Il ne s’agit plus de raisonner en termes de projets, mais de processus, la coopération allant migrer de réalisations en transformations dans la durée ». Des expériences diverses ont ainsi été exposées par les participants : paradoxe de la méthode grecque de réforme des collectivités territoriales. Pour Konstantinos Askounis, président de l’Union centrale des municipalités de Grèce, « malgré la pénurie d’argent des collectivités territoriales et la réduction du nombre de mairies, les maires sont devenus plus proches des citoyens et font davantage confiance aux élus territoriaux ». Au Maroc, pour Abdelkebir Berkia, président de la région Rabat-Salé, c’est la nouvelle constitution, en 2011, qui a consacré « les avancées de la régionalisation et les élus peuvent s’exprimer librement ». La Libye, pour sa part, a fait, depuis la chute de Khadafi, sa première expérience démocratique. Chaotique, selon Saad Elsaaiti, vice-président du conseil local de Benghazi : « alors que les conseils municipaux doivent travailler de façon assez libre, le pouvoir central continue à imposer sa loi, au lieu d’accorder des prérogatives élargies aux municipalités. Cependant, à Benghazi, nous coopérons avec des conseils municipaux de beaucoup de pays,. Il s’agit de montrer à ceux qui nous ont élus que nous sommes capables d’ouvrir des fenêtres sur l’extérieur. Ce qui était une grande revendication de la jeunesse de ce pays. » Sur l’autre rive, en Espagne, en cette période financière, immobilière, de chômage massif, les élus locaux, comme Francisco de la Torre Prados, maire de Malaga, qui estime que dans son pays « la décentralisation est incomplète », pense que c’est au niveau local qu’il faut « asseoir la démocratie et qu’il appartient à la société civile d’impulser la réalisation de projets, voire la création d’entreprises pour regagner la compétitivité ». Autant de chemins et autant d’expériences, entravées parfois par des tragédies : « au Liban, alors que notre quête de démocratie est plus que jamais une exigence populaire, la guerre en Syrie amène quotidiennement son lot de réfugiés avec les tensions que cela peut créer. Dans ma propre ville, déplore Mohamad Issa, maire d’El Mina, il y a plus de 8 400 réfugiés, dont beaucoup occupent des emplois qu’exerçaient autrefois les Libanais ». Selon son propre rythme et sa propre voie Et si en Tunisie on se félicite d’avancées démocratiques réelles, c’est la crise de l’emploi, le chômage des diplômés, les inégalités régionales de développement et la corruption qui continuent à empoisonner la vie du pays. « La question de la décentralisation est devenue centrale et nous allons vers la création de nouveaux niveaux de consultation locale, affirme Mabrouk Kessentini, président de la délégation spéciale de la municipalité de Sfax, plaidons pour un allégement des procédures administratives, notamment pour la création de très petites entreprises, ce qui faciliterait la transition du secteur informel vers le formel ». Ailleurs, on piétine encore, comme en Mauritanie ou sécheresse et misère, analphabétisme, sont des handicaps majeurs à la représentativité de la population. Mais chacun, selon son propre rythme et sa propre voie fait son apprentissage de la démocratie de proximité, avec la certitude que les collectivités territoriales réussissent mieux que les Etats. C’est de la construction de cette démocratie locale que la coopération décentralisée prendra son essor. Gérard Lanux La Marseillaise

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