-L’Algérie pourrait entrer dans le capital de Peugeot, selon certaines informations. La situation de crise que vivent les entreprises européennes dont les françaises offre-t-elle des opportunités à ne pas rater ?
L’Algérie a depuis le renforcement du prix des hydrocarbures assaini sa situation financière en remboursant par anticipation sa dette publique internationale et a accumulé des réserves de change considérables (200 MDS USD). Cette apparente aisance financière dans un contexte de crise de la dette des pays occidentaux (Europe, Etats-Unis), mais également le Japon, la rendrait éligible à l’acquisition à «bon compte» d’actifs industriels ou financiers, mais cela ne suffit pas. Il y a plusieurs raisons à cela...
- L’Algérie ne s’est pas dotée d’un véhicule professionnel de gestion d’actifs capable de définir une stratégie d’investissement cohérente et d’évaluer le prix des actifs. Ni le Fonds national d’investissement (FNI), ni les 6 Banques publiques ne sont à même aujourd’hui de suivre un portefeuille d’actions. J’en veux pour preuve leur absence totale dans l’animation de la Bourse d’Alger !
- La volonté réelle et sincère des pays d’accueil de voir l’investisseur algérien jouer un rôle actif dans les orientations de gestion de la Société dans laquelle il aurait investi. Ce point est capital pour qualifier la nature de l’investissement réalisé.
S’agit-il d’un simple placement financier ? ou d’un investissement à caractère stratégique visant à transférer du savoir-faire en Algérie ! Si l’objectif est d’apprendre de son investissement, il faudra regarder à prendre le contrôle d’entreprises de taille intermédiaire relevant plus des techniques de Private Equity que de la Bourse.
S’agit-il d’un simple placement financier ? ou d’un investissement à caractère stratégique visant à transférer du savoir-faire en Algérie ! Si l’objectif est d’apprendre de son investissement, il faudra regarder à prendre le contrôle d’entreprises de taille intermédiaire relevant plus des techniques de Private Equity que de la Bourse.
- Les fonds souverains de Singapour, de Chine et des pays du Golfe qui ont acheté des actions des grandes Banques internationales au début de la crise financière en 2008 ont presque tous perdu de l’argent. Ils ont tous cru faire une bonne affaire en achetant les actions apparemment décotées de grandes institutions bancaires pariant sur une recovery du secteur sans analyser sérieusement ce qui était profondément à l’ouvre dans le secteur financier : une grande remise en cause du modèle de croissance et de profit. Il en va de même pour le secteur automobile mondial en général et Européen en particulier : est-ce une opportunité de prendre une participation dans Peugeot ?
-Compte tenu de la gestion prudente qui est faite des réserves de change actuellement, pensez-vous que l’Algérie soit désireuse ou en mesure de faire de tels investissements ?
L’Algérie gère ses réserves de change en «bon père de famille». Elle détient un portefeuille d’obligations souveraines de premier rang et un prêt au FMI. Elle a privilégié un risque faible au rendement de ses placements. Ses avoirs constituent la contrepartie de l’énorme masse monétaire en circulation dans le pays reflet de l’important programme d’investissement public engagé depuis plusieurs années et d’une forte revalorisation des salaires. Elle n’a pas «isolé» de cagnotte sous la forme d’un fonds souverain pour réaliser ce type d’investissements. L’Algérie ne «sort» de ses habitudes de gestion prudente des réserves de change que lorsqu’ elle est «politiquement» sollicitée comme dans le cas du FMI et ce cas ne déroge pas à son dogme de prudence.
Rappelez-vous qu’en 2008 les dirigeants du pays se sont tous félicité que l’Algérie ait échappé à la crise financière internationale parce qu’elle n’y était pas «connectée».
Rappelez-vous qu’en 2008 les dirigeants du pays se sont tous félicité que l’Algérie ait échappé à la crise financière internationale parce qu’elle n’y était pas «connectée».
-La venue de François Hollande est porteuse d’espoir quant à l’amélioration des relations bilatérales. Qu’est-il attendu de part et d’autre sur le chapitre strictement économique ?
Les relations algéro-françaises sont singulières. Elles sont toujours porteuses d’une charge émotionnelle qui ne permet pas l’objectivation des rapports dans le domaine purement économique et commercial : la France se sent toujours chez elle en Algérie et l’Algérie attend beaucoup plus de la France qu’un simple rapport d’échange de produits et de services. Faut-il le déplorer ? Lequel des deux partenaires est en défaut par rapport à cette relation. L’Algérie qui fait une grande place à la France dans son commerce extérieur ou la France qui considère qu’elle n’a pas d’effort particulier à fournir, que ce rang de premier fournisseur lui revient de fait ou de droit. A mon sens, les deux pays gagneraient à optimiser économiquement et politiquement une partie de l’héritage historique commun.
La France a un besoin impératif et stratégique de l’Algérie dans un contexte de crise économique et géopolitique (Sahel).
La France a un besoin impératif et stratégique de l’Algérie dans un contexte de crise économique et géopolitique (Sahel).
L’Algérie a besoin d’un partenaire qu’elle connaît bien pour ses ambitions en matière de développement et de relations internationales. Mais aujourd’hui avec toute sa bonne volonté, la France ne peut offrir plus qu’elle ne peut. Sa situation financière est exsangue, ses grands groupes industriels et financiers se débattent avec leurs dettes ou leurs surcapacités de production. Ils sont en concurrence avec le monde globalisé pour conserver ou gagner des marchés.
Ils ne peuvent plus beaucoup investir et cherchent des débouchés à leurs produits. Renault vient de vendre sa participation de 6,5% dans Volvo pour 1,5 MDS, il va consacrer une partie à son désendettement et l’autre à réinvestir en France. Il n’a rien à faire objectivement en Algérie, à l’exception d’une injonction politique de l’Etat français !
Safia Berkouk
EL WATAN
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