mardi 19 mars 2013

Nassim Lounes. Co-fondateur et général manager chez Med&com : «L’utilisation des réseaux sociaux par les entreprises a donné naissance à de nouveaux métiers»


Titulaire d’un master en management spécialité communication & marketing dans les services, titulaire aussi d’une maîtrise en économie et gestion de l’entreprise, Nassim Lounes, et son associé Mehdi Mobarek, ont créé en 2006 l’agence web Med&com ; une société de conseil en webmarketing qui fournit des prestations d’expertise pour des projets alliant marketing, communication et TIC. Nassim lounes a également lancé N’TIC magazine, un magazine gratuit spécialisé dans les TIC.

-Quelles sont les entreprises qui utilisent les réseaux sociaux en Algérie ?
Née il y a 3, 4 années, l’utilisation des réseaux sociaux par les entreprises est une pratique qui est nouvelle en Algérie. Nous pouvons classer ces entreprises en trois catégories. En premier lieu, on retrouve celles qui activent dans des secteurs fortement concurrentiels tels que la téléphonie et l’automobile. Ces entreprises ont été les premières à s’intéresser aux réseaux sociaux comme un moyen de communication avec les consommateurs, en l’occurrence les multinationales Djezzy et Nedjma.
Cette dernière qu’on retrouve d’ailleurs en tête de liste du classement des marques ayant le plus grand nombre de fans sur  Facebook. On retrouve aussi l’acteur local Mobilis qui vient en 5e position du classement. Les constructeurs automobiles quant à eux ils y sont tous. Depuis peu, on retrouve de plus en plus les entreprises appartenant au secteur agroalimentaire, autrefois réticentes du fait que les médias sociaux, en particulier Facebook, n’étaient pas encore considérés comme étant des canaux de communication mais plutôt des médias de divertissement, c’est donc une question de cible.
C’est aussi une question de retour sur investissement «ROI» qu’il n’était pas possible de quantifier, jusqu’à ce que les chercheurs du domaine des médias sociaux aient élaboré des indicateurs tels que le taux d’engagement (nombre de «like» sur les publications, nombre de commentaires, partage de l’information,…), en plus du nombre de fans, encore faut-il que ces fans interagissent et qu’ils soient transformés en clients.
-La deuxième catégorie qui utilise les réseaux sociaux est bien celles des professionnels qui n’investissent pas les mêmes moyens que les multinationales, mais qui ont compris que ces réseaux peuvent constituer un moyen de communication efficace et peu coûteux. C’est le cas des petits commerces de proximité (restaurants, artisans,…) qui cherchent à constituer une base de fans leur permettant de se faire connaître, de lancer des promotions…
Donc, entre acteurs qui mettent de grands moyens humains et financiers dans la création de communautés pour ensuite les animer et les petits business ayant peu de moyens, chacun essaye à son niveau d’optimiser sa présence sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, cette nouvelle pratique qui est l’utilisation des réseaux sociaux par les entreprises a donné naissance à de nouveaux métiers. En effet, les pages Facebook se créent en général au niveau du département marketing, ensuite cela prend de l’ampleur et demande beaucoup de travail, c’est aussi de la stratégie. Ainsi, des agences ont été créées à l’image de Med&com pour aider les entreprises à gérer leur présence sur le web. C’est un nouveau métier qui est né, aucune école ne forme aux métiers des médias sociaux, chez Med&com nous essayons de détecter des passionnés, des profils ayant déjà des blogs, des espaces fan page, des forums…nous les mettons dans des conditions de travail favorables leur permettant de gérer ceux de nos clients.   
-Est-ce qu’en Algérie les réseaux sociaux sont utilisés par des institutions et autres organisations à but non lucratif ?
Les hommes et partis politiques ont déjà commencé à s’intéresser aux réseaux sociaux, certains ont une stratégie sur ces réseaux, un réel travail a été fait lors de la dernière campagne électorale en termes de recrutement de fans, de reportages vidéos, de photos… Que ce soit Facebook ou Youtube, bien que la population d’internautes connectée est relativement jeune et ne s’intéresse pas forcement à la politique, cette population représente un relais d’information très important. Les associations telles que Nes El khir sont également présentes sur les réseaux, leur permettant de promouvoir des actions caritatives ou de bienfaisance.
Cependant, l’absence est marquée par les organisations étatiques qui sont encore réfractaires à ce type de communication, bien qu’elles aient tout intérêt à développer leur présence sur le web. On peut imaginer le ministère de l’Intérieur qui adopte ce type de communication dite «one to all», en rendant accessible en ligne la consultation du dossier à constituer pour avoir un passeport, l’information serait diffusée une seule fois, mais ce sont des milliers voire des millions d’utilisateurs qui auront accès à celle-ci. Le coût serait plus élevé si le ministère en question mettait en place un système de communication du type «one to one» correspondant à un service hotline destiné à assister les utilisateurs par l’intermédiaire d’un télé-assistant.
-Les réseaux sociaux sont-ils rentables pour les entreprises ?
Cela dépend aussi bien de la stratégie que de la nature de l’activité de l’entreprise. Quand un opérateur mobile lance une offre ou une promotion et que celle-ci est diffusée sur les réseaux sociaux, il peut facilement atteindre des milliers de personnes. Les réseaux sociaux remplacent également les services hotline, ce qui permet aux clients de rester informés et de poser de multiples questions sur les délais de livraison par exemple pour les constructeurs automobiles. Les réseaux sociaux présentent aussi un avantage par rapport aux autres médias du fait de la viralité de l’information. En effet, avec 300 amis par profil en moyenne sur Facebook, on peut imaginer la vitesse de propagation d’une information. Par contre, pour le cas des marques haut de gamme qui travaillent sur l’image, ce n’est peut-être pas sur Facebook qu’elles doivent aller. Toutefois, il ne faut pas oublier que nous visons aussi des influenceurs qui peuvent voir des publicités et en parler à leurs parents par exemple. Le web est ainsi présent dans la vie des Algériens directement ou indirectement.
-Selon les résultats de l’étude Webdialna, les  internautes  du  web  algérien  sont  une  population jeune. Près de 60% sont âgés de 20 à 35 ans, c’est aussi une population à dominance masculine (68,3% d’utilisateurs hommes contre 31,7% femmes), ayant un niveau universitaire à hauteur de 63,4%. Les internautes sont basés  essentiellement au centre du pays avec  50% d’utilisateurs. Cette population ne constitue pas forcément la cible de toutes les entreprises. Alors, est-ce que malgré cet état de fait, elles sont toutes tenues d’être connectées aux réseaux sociaux ?
En effet, c’est une question de cible. Un constructeur de machines agricoles par exemple n’a aucun intérêt à aller sur Facebook du fait que sa cible a plus de 40 ans, c’est une population rurale qui n’a peut-être pas d’accès à internet. Toutefois, cela ne l’empêche pas d’avoir un site web et pourquoi pas être présent sur le réseau Linkedin. Le choix du media social adéquat dépend ainsi de la marque et de la cible. Il y a donc une stratégie derrière la présence des entreprises sur les réseaux, nous essayons par exemple d’orienter nos clients vers la création de contenu en langue arabe du fait qu’elle est la langue la plus utilisée par le web Algérien. Il est clair qu’on ne peut pas vendre n’importe quel produit ou service sur Facebook, mais chaque marque a sa place sur les médias sociaux et il n’y a pas que Facebook sur le web.   
-Qu’en est-il de la stratégie de Med&com sur les médias sociaux ?
Nous avons effectivement une stratégie sur les médias sociaux, nous avons un compte Facebook qui ne compte pas un nombre très important de fans. Néanmoins, nous pouvons recruter des fans, nous le faisons tous les jours pour nos clients mais ce n’est pas notre objectif.Notre cible à nous est très restreinte, l’essentiel de la communication ne va pas vers le grand public mais plutôt vers nos clients, vers des étudiants ou des passionnés de webmarketing. Notre fan page compte 500 personnes, mais ce sont de vrais passionnés par le domaine, ils interagissent, le taux d’engagement est donc très élevé.
Par ailleurs, nous essayons de communiquer sur les projets de l’équipe et aussi de partager la vie de l’agence, les anecdotes, les anniversaires… Nous faisons de notre mieux pour véhiculer une image attrayante déjà pour les clients, nous travaillons beaucoup notre image ainsi que notre capacité à captiver les talents.    
-Est-ce que le fait de constituer des réseaux internes à l’entreprise est une pratique courante ?
C’est une pratique qui existe, il y a même un gros business qui est en train de se développer, toutes les multinationales ont leurs réseaux sociaux. Plusieurs raisons poussent les entreprises à adopter de telles pratiques, à savoir le renforcement de la culture d’entreprise et aussi pour isoler son réseau social du reste du web pour des raisons de confidentialité, d’efficience et d’efficacité. Certaines entreprises bloquent l’accès à Facebook depuis le lieu de travail pour des raisons de productivité.     
-Quels risques pour l’entreprise d’être sur les réseaux sociaux, et quelles sont les opportunités pour les entrepreneurs du secteur du conseil en communication ?
On ne peut pas parler de sécurité informatique du moment que certains hauts responsables ont des comptes sur Yahoo et Gmail, exposant ainsi leurs informations à ces dernières. Nous jeunes entrepreneurs du web et startup nous avons du mal à trouver des interlocuteurs au niveau de la tutelle. Nous sommes formateurs et créateurs de valeurs, alors que d’autres sont destructeurs de valeur à l’image des importateurs. Or, nous sommes malgré cela traités fiscalement de la même manière que les autres, nous n’avons aucun avantage, nous n’avons eu que des discours sur des programmes de fonds de développement par exemple. Tout ce que nous avons accompli jusque-là est dû à la motivation des collaborateurs, à leur passion des nouvelles technologies et aux clients qui nous font confiance.
 
Hind Slamani
El Watan
 

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