mercredi 14 mars 2012

Les travaux d’extension avancent Sur le chantier du métro d’Alger

Le métro d’Alger devrait être long de plus de 50 kilomètres. Un projet immense mais qui ne fait plus peur aux ingénieurs algériens, aguerris à l’amère expérience de la première ligne. Virée dans les entrailles d’un métro en chantier.


“C’est bon, le tunnel est fin prêt. Nous l’avons réalisé avant les délais”, s’écrie le responsable du chantier de la ligne du métro entre haï El-Badr et El-Harrach. “D’ici le mois de juin, la pose des rails peut se faire. Il faudrait donc compter une année ou un peu plus pour voir cette ligne exploitable commercialement.”
Sous une pluie fine, nous descendons dans les entrailles de la ville, nous parcourrons le tunnel jusqu’au bout. Le tunnel est bien fini, d’ailleurs on ne croise que quelques ouvriers en train d’effectuer des opérations “esthétiques”. Les stations prévues, dans ce tronçon, sont beaucoup plus spacieuses et plus pratiques que celles de la ligne déjà en exploitation. Celle de Badjarrah est un chef-d’œuvre architectural, alors que celle près de la gare d’El-Harrach est directement reliée à la salle des billets de la SNTF, une façon de permettre aux usagers du train de prendre directement le métro, et vice-versa.
Nous entamons, juste après, la plongée sous l’oued El-Harrach. C’est une première en Algérie. Le métro passera sous l’oued. Il aura fallu prélever des échantillons de l’oued, les analyser en Allemagne avant d’entamer les travaux. Aujourd’hui, le tunnel est là, un défi vient d’être relevé. Le consortium composé de l’allemand Dwydag (maître de l’ouvrage), de l’italien Trevi (fondations spéciales) et de l’algérien Cosider avait déjà à son actif la réalisation du tronçon El-Hamma - Haï El-Badr. C’est lui qui a obtenu les tronçons El-Harrach et Aïn Naâdja. Le consortium ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, lui qui a fait ses preuves sur le terrain. Il veut arracher le marché de la ligne de l’aéroport, longue de douze kilomètres. Cosider se dit prêt à mettre les gros moyens, jamais utilisés jusque-là dans ce grand chantier, nous confie-t-on. L’avis d’appel d’offres, pour ce tronçon, devrait être lancé d’ici le mois de juin. Il est d’une importance capitale dans la mesure où il permettra de relier l’ensemble de l’est de la capitale vers le centre-ville. Ceci en attendant que le chantier entre la Grande-Poste et la place des Martyrs soit achevé et que les extensions prévues à l’ouest d’Alger (Chevalley, Ouled Fayet) soient lancées. En tout, le métro d’Alger devrait être long de plus de 50 kilomètres. Un grand chantier mais qui ne fait plus peur aux ingénieurs algériens, aguerris à l’amère expérience de la première ligne.
Aussitôt la première ligne du métro d’Alger mise en circulation, les projets d’extension s’accélèrent en vue de permettre à la capitale de se doter d’un réseau long de plus de 50 kilomètres.
Le projet, qui avait traîné pendant des décennies, au point de faire douter les Algériens quant à sa faisabilité, a fini par voir le jour. Mieux, il a donné un nouveau souffle aux autres projets et a encouragé les jeunes ingénieurs à croire en leurs capacités. Ces ingénieurs, nous les avons rencontrés sous terre. Certains d’entre eux venaient tout juste d’inspecter le nouveau chantier d’extension vers Aïn Naâdja. “On n’attend pas. On a déjà le matériel sur place et d’ici un mois, on commencera à creuser. Dans une année et demie, au maximum, le tunnel vers Aïn Naâdja sera prêt”, nous confie-t-on avec assurance.
Leur enthousiasme ne s’arrête pas là, puisque le projet d’extension du métro prévoit une autre ligne qui démarrera d’El-Harrach vers l’aéroport international, en passant par Bab-Ezzouar. Une autre extension est prévue à partir d’Aïn Naâdja vers Baraki.

Des cadres algériens enthousiastes
Qu’en pensent les deux générations : celle qui a débuté avec le projet, au milieu des années 1980, et celle qui a débarqué il y a deux ans et qui s’est formée sur le tas ? Sur place, nous rencontrons un vieux routier, qui était en train de former deux jeunes ingénieurs. “La direction générale de Cosider a compris qu’il fallait miser sur les jeunes ingénieurs. Avant, ils venaient pour une ou deux années, et une fois formés, ils partaient chez le privé ou à l’étranger. Maintenant, avec des salaires motivants et une plus grande considération, ils sont les véritables maîtres à bord.”
Le vieux routier a débuté sa carrière avec le démarrage du chantier du métro, au milieu des années 1980. Il le connaît “coin par coin et pierre par pierre”. Il est fier de diriger, actuellement, une équipe de jeunes ingénieurs dynamiques.
Leur plus grande fierté, dans ce tronçon, a été le tunnel creusé sous l’oued. Une première en Algérie. Sur place, nous rencontrons un jeune ingénieur formé sur chantier. Aujourd’hui, c’est lui qui gère toute une équipe. “J’ai fait des études en génie civil. Avant d’arriver ici, je ne savais rien sur les tunnels. Mais aujourd’hui, grâce à mon expérience sur le terrain, mes lectures sur Internet, rien ne me semble étranger dans ce monde et je peux prendre n’importe quel autre chantier de tunnel, sans aucune difficulté.”
Le consortium a mis les moyens au profit des jeunes cadres. Tous les chantiers sont équipés d’Internet. “Je ne suis plus obligé de me déplacer vers la direction générale à chaque fois que j’ai un problème”, nous confie-t-il, qui, en même temps, répondait au téléphone pour rassurer des habitants mitoyens du projet et qui s’inquiétaient sur les risques d’effondrement de leurs vieilles bâtisses à cause du métro. “Comme vous le constatez, nous gérons tout. Il m’arrive de venir sur chantier à 8 heures du matin et de ne repartir que vers 22 heures. Quand on aime ce que l’on fait, on ne compte pas les heures, on oublie la fatigue.”
Pour ces ingénieurs, la fierté se lit dans les yeux, même s’ils se disent déçus de lire dans la presse que le métro a été “un succès français”. Pour eux, “les Allemands ont apporté la technologie que nous ne maîtrisons pas. Ils ont mis les moyens dont nous ne disposons pas. Mais le travail a été fait essentiellement par les Algériens. Pour preuve, sur le chantier d’El-Harrach, seule une quarantaine d’Allemands travaille contre un millier d’Algériens”.
Ces cadres ne comprennent pas, non plus, comment des journaux ont inventé l’histoire de fuites d’eau dans le métro, durant les intempéries. “Je vous jure que nous avons passé le tunnel, à pied, de bout en bout, et on n’a pas trouvé la moindre goutte”, nous lance l’un d’eux, avant de préciser que “c’est un domaine où l’erreur n’est pas permise et où les contrôles sont des plus rigoureux. Vous savez, tous les jours, avec les ingénieurs allemands, il nous arrive de ne pas être d’accord sur des estimations et tous les jours, le bureau d’études chargé du contrôle et du suivi  tranche sur les différends, d’ordre technique. Mais si les Allemands s’occupent uniquement des aspects techniques, nous, on s’occupe de tout le reste, c’est notre devoir, en tant qu’Algériens”.
Son collègue précise que “c’est vrai que, sans les Allemands, on n’aurait jamais avancé, mais c’est vrai aussi que sans nous, les Allemands n’auraient jamais avancé”. Le partenariat a donné des fruits qui sont palpables et l’enthousiasme qui gagne ces jeunes cadres est sans limite, pour peu qu’on les encourage.

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