samedi 4 février 2012

Le Bilan des 50 ans de l’économie algérienne. Partie 1 : L’évolution politique et économique de 1963 à 2012

Les forces sociales conservatrices et  réformistes  souvent antagoniques tenant compte du poids de l’histoire sont le moteur de la dynamique ou de  la léthargie de toute société. Car, comment ne pas se remémorer  les promesses des dirigeants politiques algériens  qui ont présidé aux destinés du pays au nom de la légitimité historique encore quand certains  évoquent  récemment  pour ceux qui veulent bien   les entendre, la fin de l’Etat de la mamelle, puis celle de la légitimité révolutionnaire. Cela  signifie surtout que le pouvoir bienfaisant comme contrat politique implicite par les tenants du socialisme de la mamelle afin de légitimer l’échange d’une partie de la rente contre la dépendance et la soumission politique et qui efface tout esprit de citoyenneté active, ce pouvoir  doit céder la place à un pouvoir juste, justicier et de justice. C’est la norme du droit qui doit en principe dans les actes et non les discours, reprendre sa place pour légitimer le véritable statut de  la citoyenneté.
Souvenons nous en 1962,  de   la domination idéologique du communisme,  l’hymne à la liberté chantée dans les rues de l’ensemble de l’Algérie indépendante, les espoirs suscités par le socialisme spécifique à l’algérienne, l’autogestion des domaines des colons qui devait élever la production, restituer les paysans dans leur dignité, lutter contre l’injustice sociale, mais aussi les luttes de pouvoir entre  l’Intérieur et l’Extérieur des différents clans. En juin 1965,  c’est  le discours du sursaut révolutionnaire du fait que l’Algérie serait au bord  de la faillite. Il fallait la redresser, grâce à un pouvoir fort qui résiste aux évènements et aux hommes, à travers trois axes, la révolution industrielle, la révolution agraire, et la révolution culturelle, en prenant comme base le plan économique du programme de Tripoli qui repose sur  la dominance du secteur d’Etat, comme fer de relance de l’économie nationale,  à travers les grosses sociétés nationales. Ceux sont   les discours triomphants de constructions des usines les plus importantes du monde, du bienfait de la révolution agraire, garantie de l’indépendance alimentaire, de l’école et de la santé pour tous et de la promesse solennelle que nous deviendrons horizon 1980 ,le Japon de l’Afrique avec les lancements du plan triennal 1967-1969,du premier quadriennal 1970-1973 et du second quadriennal 1974-1977. Rappelons nous  ces discours de la vertu des fameuses industries industrialisantes et au niveau international l’Algérie leader du nouvel ordre économique international sans sa lutte contre l’impérialisme cause fondamentale du développement du sous développement. Et voilà qu’après la mort du Président après une longue maladie et une lutte de pouvoir qui se terminera par un compromis, et la venue  d’un nouveau président, qu’en 1980, nous apprenons  que cette expérience a échoué. Du fait de la compression de la demande sociale durant la période précédente  et  surtout grâce au cours élevé du pétrole, du cours du pétrole, les réalisations porteront sur les infrastructures, la construction de logements  et l’importation de biens de consommation finale avec le  programme anti-pénurie et  la  construction sur tout le territoire national des souks fellahs. L’Algérie ne connaît  pas de crise économique selon les propos télévisés un d’ex Premier Ministre, qui touchait en ces moments les pays développés avec un baril  en termes de parité   de pouvoir d’achat 2010, équivalent à 80/90 dollars. C’est alors l’application mécanique  des théories de l’organisation, car les  grosses sociétés nationales ne seraient pas maîtrisables dans le temps et l’espace. Mais la  population algérienne contemple en 1986,  l’effondrement du cours du pétrole les  listes d’attente et l’interminable pénurie : et c’est toujours la faute de l’extérieur. Et voilà que nous avons un autre discours : les algériens font trop d’enfants, ne travaillent pas assez.  L’on fait appel à la solidarité de l’émigration que l’on avait oubliée. IL s’ensuit l’effondrement du dinar  dont on découvre par magie que la parité est fonction du cours du dollar et du baril de pétrole et non au travail et à l’intelligence seules sources permanentes de la richesse. On loue alors les vertus du travail, de la terre, l’on dénonce les méfaits de l’urbanisation, du déséquilibre entre la ville et la campagne, la priorité  devant être donnée à l’agriculture dont on constate le niveau alarmant de la facture alimentaire. Et  c’est le slogan de l’homme qu’il faut à la place qu’il faut et au moment qu’il faut, thème reproduit également aujourd’hui.
Octobre I988 conséquence de la crise de 1986 qui a vu s’effondrer les recettes d’hydrocarbures de  2/3, contredit ces discours populistes, et c’est le début timide d’une presse libre et d’un multipartisme que l’on tente de maîtriser par l’éclosion de Partis (une famille pouvant fonder un parti avec des subventions de l’Etat) avec la naissance d’une nouvelle   constitution en  1989 qui introduit des changements fondamentaux dans notre système politique qui avait un caractère monocratique  depuis  l’indépendance en consacrant  l’existence du multipartisme, conférant ainsi à notre système politique un caractère pluraliste du moins dans les textes. Sur le plan économique, entre I989-I99O c’est  l’application des réformes avec l’autonomie de la banque centrale, la tendance à la convertibilité du dinar, la libéralisation du commerce extérieur, une tendance à l’autonomie des entreprises et l’appel, très timidement, à l’investissement privé national et international sous le slogan secteur  privé facteur complémentaire du secteur d’ Etat, après le socialisme spécifique,  de l’économie de marché spécifique à l’algérienne avec la dominance du secteur d’Etat soumis à la gestion privée, des lois portant autonomie des entreprises publiques. Effet de la crise économique, nous   assistons  à une  crise politique sans précédent  qui commencera entre  1989/1990,  crise accélérée par des élections législatives, coordonnées par  un nouveau chef de gouvernement issu des hydrocarbures   des émeutes dont  l’aboutissement sera la démission  de ce Président après plus d’une décennie de pouvoir. Le procès est fait cette fois à la décennie noire de 1980/1990.
Et c’est la liste interminable de chefs de gouvernement et de ministres, changement successif du à la profonde crise qui secoue le pays.  C’est la naissance du Haut Comité d’Etat (HCE),  la venue d’un historique et figure charismatique qui donnera une première lueur d’espoir,  présidera à peine  une année le HCE avant d’être assassiné, son remplacement par  un autre membre du HCE,  avec parallèlement, un Conseil Consultatif faisant œuvre de parlement désigné. L’on rappellera  comme chef de gouvernement  le    père de l’industrie lourde des années I97O qui prônera l’économie de guerre mais avec son départ rapide du fait de  la cessation de paiement. Lui succèdera un premier ministre membre du HCE artisan du programme de Tripoli qui signera l’accord de rééchelonnement avec le FMI, démissionnant tout juste après, l’Algérie  étant en cessation de paiement n’ayant pas de quoi  acheter un kilo de farine,  alors que certains responsables politiques  clamaient haut et fort  à la télévision et dans la presse que l’Algérie n’irait pas  au rééchelonnement. Les accords avec le FMI verront  une baisse drastique de la valeur du dinar qui sera dévaluée. La période qui suit verra un Chef d’Etat  avec  un parlement de transition à savoir le C.NT (conseil national de transition) combinaison d’associations et de partis politiques.
Viendrons les élections de ce Président  axé sur le rassemblement, pour sortir le pays de la crise et une nouvelle  constitution (1996. Elle crée la seconde chambre, dite Conseil de la Nation, et par le truchement de l’article 120, lui donne pratiquement le pouvoir de bloquer un texte de loi voté par l’APN. Mais fait nouveau et important, elle limite le  mandat présidentiel à deux  étalé sur cinq années. Mais nous sommes toujours dans la même ambiguïté politique en maintenant  le  caractère dual  de l’Exécutif,( ni régime parlementaire, ni régime présidentiel) tout en  consolidant  le   système de Conseils existants  dont  l’institution  d’un Haut Conseil Islamique et d’un Haut Conseil de Sécurité qui est présidé par le président de la République. C’est à cette période  que naît  le  Parti  le rassemblement national démocratique (R.N.D) dont le fondement du discours est la lutte anti-terroriste  qui raflera presque tous les sièges  en  8 mois d’existence tant de l’APN que du Sénat au détriment du Parti FLN et qui provoquera par la suite des protestations interminables et une commission sur la fraude électorale dont les conclusions ne verront jamais le jour. Les parlementaires du fait de la situation sécuritaire de l’époque, auront surtout  pour  souci  de voter pour soi même des rémunérations dépassant 15 fois le SMIG de l’époque alors que la misère  se généralise, oubliant naturellement du fait de la généralisation des emplois- rente, qu’un parlementaire aussitôt sa mission terminée retourne à son travail d’origine, et qu’une retraite automatique revient à afficher un mépris total pour une population meurtrie. Dans la foulée, la venue de deux chefs de gouvernement dont le premier technicien   pratiquera le statut quo et le second par l’application des accords  du FMI qui aura à son actif le cadre macro-économique stabilisé actuellement  mais des retombées sociales négatives du fait de la douleur de cet ajustement. Ce président démissionne et des élections sont programmées  le 08 avril I999 avec   l’élection d’un  nouveau président qui promet de rétablir l’Algérie sur la scène internationale, de mettre fin à l’effusion de sang  et de relancer la croissance économique pour atténuer les tensions sociales qui sera matérialisé plus tard   par le référendum sur la réconciliation nationale avec un vote massif en faveur de la paix.
Qu’en est-il  sommairement   de 2000 à janvier 2012 ?  Un chef de gouvernement est nommé après plus de 8 mois d’attente mais son mandat sera de courte duré à peine une année  du fait des conflits de compétences. Un second chef de gouvernement est  nommé, plus politique qui s’engage également à redresser la situation mais qui démissionne, tout en se présentant  candidat à la présidence avec comme conséquence  une dualité  dans les rangs du FLN dont il est tissu. Il est remplacé par le Secrétaire Général du RND. Viennent   ensuite  les élections du 08 avril 2004 qui sont largement remportées par  le précédent Président avec trois  chefs de gouvernement successifs : premièrement le secrétaire général du RND qui a été chargé des élections de 2004,  , puis le secrétaire général du FLN  courant 2007 ce Parti avec les élections successives  étant devenu majoritaire tant au niveau de l’APN   que du Sénat, avec peu de modification dans la composante ministérielle  puisque l’ancien chef de gouvernement n’a pu nommé aucun ministres entre mai 2006 et juin 2008, (assistant  d’ailleurs  de 1999 à 2010  à la même composante à quelques variantes idem pour les walis et les postes clefs de l’Etat ) puis à nouveau courant 2008  le retour du secrétaire général du RND qui précisons a été  chargé   des élections d’avril 2009. C’est également durant cette période qu’est signé l’Accord avec l’Europe le 01 septembre 2005,   pour une zone de libre échange constituant un acte politique e première importance depuis l’indépendance politique postulant ainsi l’irrésistibilité vers l’économie de marché, et  courant novembre 2008  qu’est amendée la constitution, non pas par référendum mais  à la majorité des deux chambres, les députes et sénateurs  se feront comme leurs prédécesseurs voter un salaire de plus de 300.000 dinars par mois. Cet amendement ne limite  plus  les mandats présidentiels, tout  en supprimant le poste de chef de gouvernement  en le remplaçant par celui de premier ministre consacrant  un régime présidentiel.
Dans la foulée  l’élection présidentielle  s’est tenue le 09 avril  2009 où l’ancien président est réélu pour un nouveau mandat de cinq années (2009/2014) en promettant la création de trois millions d’emplois durant cette  période et d’augmenter le pouvoir d’achat des Algériens. Aussi, la période de  2004 à  2009 devait être consacrée à asseoir un Etat de droit  avec  la réforme des institutions, du système financier poumon des réformes, du secteur agricole  et  l’accélération des privatisations.  L’objectif  était  une dynamisation de la production et des exportations hors hydrocarbures. Le pré programme  de soutien à la relance économique  reposant sur les dépenses publiques (plus de 7 milliards de dollars US)  ayant eu lieu avant 2004, celui programmé entre 2004/2009 clôturé en principe à 200 milliards de dollars US mais dont le bilan  n’a pas été rendu public. Durant cette période, comme durant la période   1980/1985,  du fait de la compression de la demande sociale durant la période du terrorisme, demande qui a explosée depuis  2000,  la priorité a été accordé aux infrastructures, logement qui ne sont qu’un moyen du développement et non au management stratégique  de  l’entreprise seule source permanente de la richesse.  C’est durant cette période que nous assistons à des déballages sur la corruption qui a d’ailleurs toujours existé mais qui prend des proportions alarmantes avec une corruption socialisée  de la BADR, de Khalifa,  de la BCIA, BNA ,BEA ,BDL  bon nombre d’agences du CPA et  d’autres banques et d’entreprises  publiques  dont Sonatrach, le projet du siècle  autoroute Est-Ouest , et bien entendu qui touche presque tous  les autres secteurs de l’économie nationale   ce qui a fait dire aux observateurs  que  le risque  est  de passer  de l’ancien  terrorisme à un autre – entendu la corruption-   plus mortel pour le pays . Entre 200/2012 nous assistons à deux politiques économiques  contradictoires. La première période de 200o/2006 a vu la signature de l’Accord d’association avec l’union européenne, l’adoption de la loi sur les  hydrocarbures, des mines, de l’électricité et du gaz  et une volonté de faire appel à l’investissement privé international mais sans vision stratégique. La deuxième période de 2007 à 2012 est caractérisée, outre par l’amendement de la loi des hydrocarbures  de 2006,( loi qui selon les déclarations des responsables en 2011 serait à nouveau amendé car n’ayant  attiré aucun investisseur potentiel) ,   par le retour au tout Etat gestionnaire avec une   dépense publique sans précédent depuis l’indépendance politique. Mais  sans que l’on ait mis  au préalable les  mécanismes  de contrôle tant politiques qu’économiques  comme le gel de la Cour des Comptes, la loi budgétaire  au niveau des  assemblées (APN et Sénat) qui vient d’être seulement adoptée fin 2011. Ainsi , a été programmé une nouvelle enveloppe  de 280 milliards de dollars entre 2010/2014 que j’aurai l’occasion d’analysera l’impact et se pose été question :  l’Algérie aura t- elle cette capacité d’absorption de cette importante masse monétaire et ne risque t- on pas  d’assister avec le divorce objectifs ambitieux, moyens de réalisation limités surtout par la ressource humaine dévalorisée  et la faiblesse d’une régulation claire , faute d’institutions adaptées à la transition à l’accélération  de la mauvaise gestion pour ne pas dire corruption ?
Le  constat à  travers ce cheminement historique est que durant cette période de transition difficile  d’une économie étatisée  à une économie de marché concurrentielle et l’Etat de droit et  la démocratie tenant  compte de notre anthropologie culturelle  est que les réformes sont timidement entamées  malgré des discours apparemment libéraux, et moralisateurs que contredisent journellement les pratiques sociales. Les banques, lieu de distribution de la rente,  continuent  de fonctionner comme des guichets administratifs, et du fait des enjeux les réformes souvent différés s’attaquant plus aux aspects techniques qu’organisationnels, alors qu’elles sont le moteur des réformes, la privatisation et le partenariat comme moyens d’investissement et de valeur ajoutée  piétinent faute de cohérence  et  de transparence ;  la facture alimentaire continue d’augmenter malgré le fameux programme agricole ( PNDA) dont il conviendra de faire le bilan du fait plusieurs  de milliards de dollars  de dépenses  , la bureaucratie  et la corruption continuent de sévir. Comme conséquence,  résultats de la pratique de plusieurs décennies et non seulement de la période actuelle, nous assistons à des  tensions  à travers toutes les wilayates  contre la hogra- la corruption, la mal vie, d’une jeunesse dont le slogan  « nous sommes déjà morts » ce qui  traduit  l’impasse du système économique  rentier à générer une croissance hors hydrocarbures, seule condition d’atténuation des tensions sociales pour faire face à ce malaise social. Nos responsables  ont –ils analysé le désespoir  des harragas,  ces jeunes  souvent avec la complicité de leurs parents  qui bravent la mort   et l’impact de l’exode des cerveaux  et vus les longues filles d’attente auprès des ambassades pour le visa, depuis l’aube du jour au crépuscule ou le rêve est de s’enfuir du pays. Pourquoi ces   séminaires sur la diaspora  à coup de millions de dollars ,  un opérateur, un cadre ou intellectuel étant surtout  au sort de ses con concitoyens,  devant  retenir le peu qui existe déjà.
A suivre…
Dossier élaboré  par des Experts de l’Association Algérienne  de Développement de l’Economie de Marché –ADEM
Partie 1 : L’évolution politique et économique de 1963 à 2012

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