dimanche 19 février 2012

Le jeune, un atout… surtout en période électorale

Faire de la politique, se rompre à ses arcanes et en atteindre les plus hauts sommets. Ils sont quelques milliers à adhérer à un parti politique.


Ces jeunes ont parfaitement intégré le discours prêché au sein du parti dans lequel ils émargent. Ils adoptent les postures et les tics de leurs aînés. Le tout avec un soupçon de fraîcheur, saupoudré de doses importantes de «communication», concept qu’ils maîtrisent bien.

Les mains à plat sur la table, Yacine, 29 ans, parle posément. Cet étudiant en ingéniorat mécanique à l’université de Tizi Ouzou est rodé aux discours politiques. Il est délégué national chargé de la jeunesse au RCD. «Carté» à l’âge légal de 18 ans, Yacine se souvient avoir été sympathisant depuis sa prime jeunesse. Et comme nombre de militants de ce parti, c’est d’abord la question identitaire et la cause amazighe qui ont attiré Yacine. «Ma famille, comme tout mon entourage, militaient pour faire aboutir les revendications amazighes.

J’ai baigné dedans !», relate, quant à elle, Dyhia, 26 ans. Il est donc indéniable qu’une «pousse» de politicien est favorisée lorsqu’elle éclot dans un terreau plus ou moins politisé. «Mon grand-père était une grande figure de la politique nationale», confie Khaled, 26 ans, coordinateur national des jeunes du MSP. «Dans ma famille, la politique occupe une très grande place», relate Mahmoud, 23 ans, vice-coordinateur national des jeunes du MSP. Ce dernier précise toutefois que ses proches adhèrent à des «tendances» diamétralement opposées à la ligne de son parti.

 

Dis-moi qui tu fréquentes,je te dirai où tu militera…

 

Comment Mahmoud s’y est-il retrouvé ? «C’était en 2008, par le biais d’amis, militants eux aussi de ce parti, et qui m’ont démontré que je m’en faisais une fausse idée», se souvient le jeune homme. Car, si le «terrain» est préparé par l’enfance, il y a, plus tard, «la» rencontre, qui déterminera à coup sûr la trajectoire adoptée. «Avec le temps, les choix mûrissent et s’assument», commente Yacine, du RCD. Pour certains, ce sont des camarades d’université, de quartier, pour d’autres, ce sont des rencontres avec des leaders de parti. Brahim, 21 ans, a, quant à lui, fait connaissance du MSP au lycée, avant sa majorité. «Ils organisaient des activités, des excursions auxquelles je participais. Ils m’ont donné l’envie de les connaître un peu plus», affirme-t-il. Quelle a été la réaction des parents face à cet «enrôlement» de leur enfant, mineur ? «Au début, les membres de ma famille, méfiante, était contre.

Mais avec le temps, j’ai réussi à les rassurer et à les faire eux aussi adhérer au parti», relate Brahim. Car l’enjeu est aussi là. Brasser le plus possible de militants et faire grossir les rangs. Et les voix dans les urnes. Pour ce faire, plusieurs méthodes. Il y a la manière douce… Un café, un bus, une salle de cours, une conversation entre copains, et le débat politique est lancé. «L’on discute avec son entourage, avec ses amis ou des jeunes rencontrés à diverses occasions. Mais il n’est pas question de forcer, juste d’essayer de convaincre», se défend Youcef. Puis il y a la manière «forte». Pas uniquement en termes de moyens déployés, mais aussi et surtout en termes de résultats. Et sur ce volet, il y a à constater que le MSP ne s’y est pas trompé. Fort de la couverture que représentait l’UGEL au sein des universités, la formation islamiste a créé, en 2009, Chems, mouvement «par et pour les jeunes».


Loin de l’idéologie, un programme… et beaucoup de social  


La «maison mère» a octroyé une entité aux jeunes pour qu’ils «se fassent les dents». «Cela évite le conflit de génération. Mais c’est surtout une manière d’atteindre des catégories que le MSP n’aurait jamais pu atteindre», concède Khaled. Et c’est sur le terrain que se joue la partie. «Nous mettons essentiellement sur pied des campagnes de sensibilisation, d’aide, de collectes pour les nécessiteux, etc. Nous organisons des conférences concernant l’actualité et ses enjeux, et diverses préoccupations sociales», énumère le coordinateur national. De même, des clubs au niveau local s’activent à diverses actions, bénévolats, ludiques ou plus sérieux, drainant ainsi les riverains, parfois oisifs et souvent en mal de distractions. Et ça marche. Pour la seule année 2011, ces différentes activités auraient vu la participation de près de 150 000 citoyens. «Parmi ces spectateurs, quelque 7000 ont rejoint Chems», affirment les jeunes militants. Et donc la maison MSP. Le PT a aussi ses «antennes» jeunes. L’Organisation de la jeunesse révolutionnaire (OJR) regroupe «des milliers de militants», dont la moyenne d’âge est de 22 ans. Et c’est au sein des syndicats autonomes et autres mouvements lycéens et estudiantins que l’OJR active.


Les jeunes parlent aux jeunes


Il est indéniable que l’élément jeune soit devenu un atout majeur, du moins dans les discours des «vieux». Car dans la pratique, rares sont les partis à permettre l’évolution des jeunes à des postes de responsabilités. Paradoxalement, l’on ne lésine pas sur les moyens afin d’en faire des pros de la politique. Des cycles de formations très pointues sont par exemple dispensés à ces nouvelles recrues. La relève s’investit, y met son temps, son énergie et sa créativité. La «génération Y» a à cœur de moderniser la pratique même de la politique, via ce qu’elle maîtrise le mieux : le «parler jeune».
L’on mise sur les nouvelles technologies de communication, les réseaux sociaux et autres outils de partage on line afin de faire passer le message à un plus grand nombre. Un atout certain. Surtout en période électorale…

Youcef, 28 ans Chargé du mouvement associatif au sein de la direction nationale du FFS :

«Je ne me vois pas exister en dehors du parti». Youcef, ambitieux et énergique, sait ce qu’il veut. «Etre un militant discipliné et un citoyen constructif». C’est à l’adolescence que le jeune homme s’éveille à la politique. Après avoir acquis une expérience précieuse au sein de la section universitaire d’Alger et autres collectifs autonomes, il intègre la direction nationale en 2011.

Mais son militantisme ne se limite pas aux locaux du FFS. «Je suis un militant ‘’multifronts’’. Je prends part aux activités de la LADDH et tente d’apporter mon soutien à diverses initiatives citoyennes», confie Youcef. Diplômé en sciences politiques, il est journaliste à la Tribune des lecteurs. N’y a-t-il pas d’interactions, voire de conflits d’intérêts dans son traitement de l’information ? «Non, je fais la part des choses. Je couvre l’actualité nationale en toute objectivité», assure-t-il.

Le moment le plus marquant de sa vie ? Ses deux rencontres avec Hocine Aït Ahmed, président du FFS. «Mon rêve. Lui serrer la main, l’entendre parler, discuter avec lui. Impressionnant. J’en ai eu la chair de poule», raconte-t-il, sourire ému et yeux pétillants
d’un enfant. Parlant d’enfant, rêve-t-il d’accéder aux plus hautes instances ?

«Président de la République… Pourquoi pas !», claque-t-il joyeusement. «Encore faudrait-il que les potentialités ne soient plus marginalisées et qu’une réelle démocratie soit instaurée»,
objecte-t-il.                         

Fadhela, 24 ans Secrétaire générale de Chams, MSP :

«Chems, c’est le projet de ma vie». Sous son apparence frêle, Fadhela a de la poigne et de l’ambition à revendre. Etudiante en droit et sciences islamiques à la faculté du Caroubier, elle a rejoint le MSP en 2003. Son oncle, cadre au sein du Hamas, lui a inoculé le «virus» politique, et l’a initiée à la «maison» MSP. En 2009, lors de la création de l’organisation jeunesse du MSP, elle est élue secrétaire générale.

«La nouvelle génération est plus ouverte que l’ancienne», juge la jeune fille. Entourée d’hommes et responsable hiérarchique de centaines de jeunes, elle confie ne pas rencontrer de problèmes du fait de sa «condition féminine». «Pour l’instant du moins», tempère Fadhela. «Il y a des conflits au sein même de Chems ou encore entre vieux et jeunes, mais pas sur les grandes lignes, juste sur des détails, tels que la méthode de travail ou la planification», assure Fadhela.

Comment allier ces activités ? «De l’organisation, de la discipline. Mes deux priorités sont Chems et mes études», explique-t-elle. Célibataire, elle juge, après un long moment de réflexion, que l’aspect politique peut-être un paramètre important dans le choix de son futur époux. «L’idéal est qu’il soit du MSP. Il pourra être apolitique ou d’une autre formation, mais à condition qu’il n’entrave en rien ma carrière», objecte-t-elle.    

 Ghania Lassal

                    

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