mercredi 8 février 2012

Le Bilan des 50 ans de l’économie algérienne. Partie 3 : Chômage, inflation, investissement et marché informel


1- Le  Produit Intérieur   Brut  2009/2011 (PIB) 
Toujours selon les institutions internationales,  le  produit inférieur brut l’Algérie arrive est de  158,97 milliards  en 2010, 183,4 milliards de dollars en 2011 avec une prévision  de  188,6 milliards de dollars en 2012. Or,  il y a lieu de souligner la faiblesse de la production et de la productivité  du fait que 97/98% des exportations  sont le résultat  des hydrocarbures à l’état brut et semi brut, les 2.3 % hors hydrocarbures  fluctuant depuis plus de 20 années  pour un montant dérisoire entre 900 millions de dollars et 1,5 milliards de dollars. Ces 2/3%  sont  constitués  en majorité de  produits semi finis issus eux-mêmes des hydrocarbures   et déchets ferreux et non ferreux. C’est que plus  de  90% du tissu économique est  constitué  de PMI/PME   organisées  sur des structures familiales, ne possédant pas de management stratégique, ne pouvant pas faire face à la  concurrence internationale.
Les importations couvrent  70/75%  des besoins des ménages  et des entreprises dont le taux d’intégration ne dépasse pas 10/15%. On peut démontrer facilement que le taux de croissance officiel  hors hydrocarbures  de 5/6% a été permis pour 80% via la dépense publique et qu’il ne reste pour les entreprises  véritablement autonomes créatrices de richesses,  pouvant évoluer dans un environnement concurrentiel mondial,  moins de 20% du produit intérieur brut. Ce qui nous renvoie à la  valeur de la monnaie algérienne. Mais fait important,   le PIB peut voiler d’importantes disparités et l’indice du développement humain combinant 1/3 du  taux de croissance, 1/3 le système éducatif et 1/3 le système de santé élaboré par le PNUD est beaucoup plus fiable. Cela explique les erreurs d’appréciation des indicateurs globaux de la banque mondiale  et du FMI vis-à-vis  de certains pays arabes qui ont connu le printemps démocratique où ces institutions ont omis d’analyser tant le déséquilibre spatial que la concentration des revenus socio professionnelles  au profit d’une minorité ans compter els fuites de capitaux hors  des frontières de certains dirigeants.
L’organisme onusien   le PNUD  a essayé d’introduire certains indicateurs  omis par le passé dans son rapport  du 02 novembre 2011intitulé «  durabilité et équité : un meilleur avenir pour tous », résultats des enquêtes sur l’année 2010. C’est ainsi qu’elle classe   l’Algérie    à la 96  ème place sur 187 pays, soit  un recul de 12 places par rapport à 2010. Cependant  ce classement rentre dans la catégorie    développement humain moyen, l’Algérie  étant mieux classé  que certains pays dits pays  émergent comme la Chine.
 2-Population algérienne, taux de chômage et taux d’inflation
La population   était de 35,6 millions d’habitants au 1er janvier 2010  et l’Office  des statistiques ((ONS) l’estime à  36,3 millions d’habitants au 1er janvier 2011. Concernant la structure de la population, la répartition par âge fait ressortir que la population âgée de moins de 15 ans constitue 28,2% de la population totale et celle de moins de 5 ans, 10%, ce qui témoigne de l’augmentation récente de la natalité.
La population active  devrait dépasser les dix ( 10)  millions  et la demande d’emplois additionnelle varierait  entre 300.000 à 400.000 personnes  par an, nombre  d’ailleurs sous estimé puisque le calcul de l’ONS applique un taux  largement inférieur  pour les taux d’activité à  la population féminine,  représentant pourtant la moitié de la population  active  et dont la scolarisation est en forte hausse. Pourtant le taux de chômage  officiel est estimé à 10% entre 2010/2011 contre 11,3% en 2008 mais incluant les sureffectifs des administrations, des entreprises publiques, les emplois dans la  sphère informelle et les activités temporaires de moins de six (6) mois, pour partie  des emplois improductifs. Or, le taux d’emploi est fonction  du taux de croissance et des structures  des taux de  productivité. Dans son rapport d’octobre 2011, le FMI note  que l’Algérie doit faire plus pour diversifier son économie et sortir de sa dépendance vis-à-vis des hydrocarbures, notamment pour dynamiser l’emploi surtout parmi les jeunes dont le taux de chômage atteignait 21% en 2009.
Quant au taux d’inflation qui se répercute sur le pouvoir d’achat, pour le gouvernement algérien, le taux d’inflation a été de 1,6 % en 2005, 3% en 2006, à 3,5 % en 2007, 4,5% en 2008,  5,7% en 2009 , moins  de  4%  en   2010, et plus de 4,5% en 2011.  Or, selon un document relatif à une étude sur l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, du centre de recherche américain, Casey Research en date du 6 mars 2008, le taux d’inflation en Algérie serait  12 %  pour  l’année 2008, contre une moyenne de 7/8% au niveau de la région Mena. Le taux d’inflation officiel est biaisé,  étant  comprimé artificiellement par  les subventions et reposant  sur un indice largement dépassé, alors que le besoin est historiquement daté.  Un agrégat  global comme le revenu national par tête d’habitant  peut voiler d’importantes  disparités  entre  les différentes couches sociales. Une  analyse  pertinente devrait    lier le processus d’accumulation la répartition du revenu  et le modèle de consommation par couches sociales. Certes,   le SNMG  a plus que doublé en passant de 6.000 à 20.000 dinars, (200 euros au cours officiel) la dernière augmentation  ayant lieu en septembre 2011,  mais  devant déflater par le taux d’inflation réel pour déterminer le véritable  pouvoir d’achat.
Aussi, une interrogation s’impose : comment est-ce qu’un Algérien, qui vit au SNMG, (200 euros par  mois, soit 6,6  euros par jour alors que le kilo de viande est de  10 euros)   fait face aux dépenses incontournables : alimentation, transport, santé, éducation. La cellule familiale, paradoxalement, la crise du logement (même marmite, même charges)  et  les transferts sociaux qui atteindront plus de 1.200 milliards DA en 2011, soit 18% du budget général de l’Etat et plus de 10% du PIB (taux identique entre 2009/2010)  jouent temporairement  comme tampon social.
 3- Faiblesse de l’investissement productif 
Les  entreprises algériennes d’une manière générale ne peuvent être compétitives et encore moins innovantes du simple fait qu’elles  disposent d’un faible  savoir à la fois technologique et managériale. Cela explique selon les données  du 7 novembre   2011 du Ministère du travail, 50.000  travailleurs étrangers exerçant en Algérie ,  répartis  dans le BTPH  pour 53% et 43% dans l’industrie, représentant 1,05% du nombre de travailleurs salariés  dans le secteur économique national ( hormis le travail informel ) la Chine  ayant  43%, suivi des Egyptiens  8%.
Le dépérissement du tissu industriel représentant moins de 5% dans le PIB  trouvent son explication   surtout dans les contraintes d’environnement qui touchent tant les entreprises algériennes qu’étrangères souvent mis en relief dans les  rapports internationaux de 2008/2011. L’entrave aux affaires en Algérie est due  surtout à l’accès aux financements, la bureaucratie d’Etat, la corruption, l’inadéquation de la main-d’œuvre formée, la politique du travail considérée comme restrictive ainsi que le système fiscal et l’environnement dont la qualité de la vie.  Combinée à  l’instabilité juridique  et  à  cet   environnement des affaires contraignant dont la bureaucratie qui freine l’investissement à plu de 50%, renvoyant au mode de gouvernance,  il en écoule  que   le bilan de l’investissement, en dehors des hydrocarbures et le commerce  tant local qu’étranger est mitigé surtout pour l’investissement productif. Selon les chiffres communiqués par l’Agence de développement des investissements, ANDI, fin  2010,  les déclarations d’investissement local, en termes de projets et non de réalisation, sont  passées de 11.000 projets en 2007, à 17.000 en 2008, pour  atteindre le chiffre symbolique de 20.000 en 2009 mais avec 1% seulement d’IDE.
De ces projets, les chiffres avancés par l’ANDI, indiquent que ce sont les projets locaux qui sont dominants  avec 99% des déclarations de projets. Pour ce qui est de la répartition des projets par secteur, c’est celui des transports qui attire le plus d’investissements depuis 2009 avec  60%  en majorité  des micro- projets, suivi  par le secteur du bâtiment, des travaux publics et de l’hydraulique (16 %), du secteur de l’industrie (10 %), celui de l’agriculture (2 %).  D’une manière générale  les investissements directs étrangers significatifs  réalisés restent insignifiants en dehors des hydrocarbures, des banques et des télécommunications.
4- Dominance de la sphère informelle
La sphère informelle en Algérie visible également dans l’ensemble des pays du Maghreb/Afrique,  contrôle plus de 65% des segments de produits de première nécessité  auxquels  plus de 70% des ménages consacrent presque l’intégralité  de leurs  revenus  (marché fruits et légumes, poisson, viande rouge et blanche , textile  et cuir ) et plus  de 40% de la masse monétaire globale  en circulation. La masse monétaire  a été    évaluée  dans le dernier rapport de la banque d’Algérie  à 2.439  milliards de dinars  fin  2010  donnant  ainsi 33, 87 milliards de dollars,  la sphère informelle  contrôlant    13,55 milliards de dollars limitant la politique monétaire de la banque centrale avec une importante intermédiation financière informelle mais avec des taux d’usure.
L’importance de cette masse monétaire captée, favorise  une  concentration du revenu   au niveau de cette sphère  avec des tendances  monopolistiques et souvent oligopolistiques (quelques offreurs pour  une multitude de demandeurs) et  alimente la demande au niveau du marché de la devise parallèle où la distorsion actuelle depuis plus d’une année est de plus de 40% par rapport à la cotation, officielle (plus de 14 dinars algérien un euro).Cette sphère contrôle  plus de 65% du marché  biens  de consommation : fruits et légumes, poisson , viande rouge et blanche et textile/cuir pour ce dernier segment à travers des importations souvent sans contrôle. Cette sphère est le produit de la bureaucratie, des dysfonctionnements des appareils d e l’Etat  assistant à un dualisme dans l’économie. Cela n’est pas  le produit du hasard. Lorsqu’un Etat veut imposer à une société des règles  qui ne correspondent pas à l’état de la société, cette dernière enfante ses propres règles qui lui permettent de fonctionner, les relations étant établies sur un  registre de confiance entre les co- contractants. Comme on ne saurait isoler  les relations dialectiques entre la sphère  régie par  le droit de l’Etat  et la sphère informelle qui a ses propres codes, existant  en Algérie    des liens diffus entre la logique rentière et l’extension de la sphère informelle. Cela  favorise la dépréciation du dinar et  l’évasion fiscale
Quelle leçon tirer  ce  bilan économique ? La non proportionnalité entre les impacts économiques et les dépenses monétaires et la déconnection de la sphère financière par rapport à la sphère réelle.Car, la vrai richesse ne peut apparaitre que dans le cadre de la transformation du stock de monnaie en stock de capital, et là est toute la problématique du développement.  Or, les  banques actuellement accompagnent peu les projets d’investissement à maturation lente,  comme n’existe pas de véritable bourse des valeurs. Ni Sonatrach, ni Sonelgaz et ni une grande entreprise privée comme Cevital n’étant cotée en bourse. La société privée Alliance Assurance  a été une exception. Cette déconnection  de la sphère financière de la sphère réelle trouve son explication  dans le fait  que la  richesse  en Algérie  à ne pas confondre avec l’ accumulation du capital productif ,  puise sa source dans la relation du triptyque: stock physique (stock ressources naturelles d’hydrocarbures) – stock monétaire (transformation: richesse monétaire) – répartition (modalités et mécanismes de répartition: investissement-consommation-fonds de régulation). La société des hydrocarbures  transforme un stock physique en stock monétaire.
On peut considérer que les conduits d’irrigation, les banques commerciales et d’investissement, opèrent non plus à partir d’une épargne puisée du marché, éventuellement un reliquat du travail, mais par les avances récurrentes (tirage: réescompte) auprès de la Banque d’Algérie pour les entreprise publiques qui sont ensuite refinancées par le Trésor public en la forme d’assainissement : rachat des engagements financiers des EPE auprès de la Banque d’Algérie, plus de 50 milliards de dollars d’assainissement des entreprises publiques   entre 1991/201 , alors   que plus de 70% de ces entreprises sont revenues à la case de départ de quoi créer tout un nouveau tissu productif s’insérant dans le cadre des valeurs internationales. Les erreurs de management quotidien sont couvertes grâce au transfert financier qui transite par le système financier et qui irrigue le système économique. Si on observe la ligne du temps, c’est-à-dire les dates qui consacrent les moments de stagnation puis de régression ensuite, parfois, des avancées des réformes,  on remarque qu’il  y a une corrélation étroite entre : plus le prix du pétrole est bas plus il y a émergence de potentiel de développement en ressources matérielles et ressources humaines. En revanche, plus le prix du pétrole s’accroît plus le potentiel de développement décélère, stagne et tend au final à régresser si le renchérissement du prix du baril de pétrole perdure.
A suivre…
Dossier élaboré  par des Experts de l’Association Algérienne  de Développement de l’Economie de Marché –ADEM

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