lundi 11 juillet 2011

Design

Les frères Boukhezar à la conquête de l’Amérique



Montréal (Canada) est spécialisé dans le design intérieur, ces deux enfants des quartiers algérois des Annassers et de Ben Omar visent maintenant l’Algérie où ils comptent proposer leurs services aux hôtels, entreprises et autres ministères.

Décembre 2010 : à quelques jours du «début officiel» du légendaire hiver canadien et par une température de -12, les deux frères Boukhezar, Adlan et Anis, ameutent le Montréal branché à l’ouest de la ville pour une soirée sous une tente qui, on l’aura compris, n’a rien à voir avec celle d’El Gueddafi. C’était l’endroit où il fallait être. Un événement imaginé par les deux frères pour promouvoir leur tout dernier projet : le design, la direction artistique et l’identité corporative du Club Sommet «Le plus bel immeuble résidentiel à Montréal», insiste fièrement Adlan, président de Kaezar Vision.
Il est clair que cet édifice n’est pas une HLM et n’y habite pas qui veut. Un immeuble destiné à une clientèle de passage dans la métropole canadienne et qui préfère louer un appartement luxueux qu’une chambre d’hôtel, même si c’est un cinq étoiles.

Pour cet Algérien de 30 ans, arrivé au Canada en 2002 avec ses parents et ses deux frères, le projet qu’il vient de décrocher fait partie d’une longue série qui n’a pas cessé de s’allonger depuis que lui et son frère Anis, 28 ans, ont fondé la compagnie en 2008. «La concurrence était rude. Mais, notre offre et notre réputation nous ont permis de rivaliser avec les plus connus ici», explique-t-il. Et ce n’est pas juste de la «com». Car, on peut trouver la touche Kaezar dans le design et la décoration de plusieurs endroits à Montréal et ailleurs en Amérique du Nord : un grand nombre d’hôtels, dont un à Boston et un autre à Los Angeles (Etats-Unis), la Banque de Montréal, plusieurs restaurants, Air Algérie Montréal, la North Carolina University (Etats-Unis), le consulat d’Algérie à Montréal et une multitude de résidences privées, entre autres. Et bien sûr, le style Kaezar est présent au siège social de leur compagnie dans l’ouest de la ville, la partie anglophone de Montréal.

INTéGRALE INTéGRATION

Une localisation qui n’est pas le fruit du hasard. C’est ici que les gens ont le moins de problèmes avec l’argent et où on ne vous rappelle pas constamment vos origines ! Quoique les Kaezar, que ce soit par ce nom qu’ils ont fini par être connus dans le milieu de la déco et du design, n’ont aucun problème avec leurs origines. «Nous revendiquons nos origines et nous aimons notre pays d’accueil. En tous les cas, dans le milieu des affaires la ‘‘généalogie’’ ne compte pas. Et si socialement le racisme peut exister, on s’en fout car nous avons notre famille, nos amis… et c’est ce qui compte», explique Adlan, qui rappelle qu’avant de venir au Canada, sa famille est passée par la France.
A Paris où il a poursuivi ses études en iconographie après avoir fait l’Ecole des beaux-arts d’Alger, il a pu voir de près la discrimination dont souffrent les Français d’origine algérienne. «Nous n’avons pas subi directement cette discrimination, mais nous n’y avons pas été insensibles», ajoute Anis, qui a étudié à l’INC d’Alger et à HEC Montréal, avec un passage dans une université parisienne. «L’avantage à Montréal est qu’il y a des Arabes riches, des Arabes qui ont réussi et un mélange entre les communautés.
Cette réussite facilite l’intégration, pas comme en France. Peut-être que le passé colonial de la France ne laisse pas un Français accepter la réussite d’un Arabe», tente d’expliquer Adlan. Ces enfants d’universitaires algériens, donc de la classe moyenne, et qui ont vécu dans les quartiers algérois des Anassers et de Ben Omar où ils ont fait leurs études primaires et secondaires, sont à l’aise aussi bien dans une soirée jet-set que dans un café sur la rue Jean Talon au cœur du Petit Maghreb à Montréal. «Nos parents nous ont élevé dans une ambiance multiculturelle. Nous sommes fiers de notre culture berbère et arabe. Nous n’avons aucun problème avec les autres apports, y compris français», affirment les deux jeunes entrepreneurs. Si les Kaezar faisaient de la politique, ils seraient les Trudeau algériens !

Mission Algérie

Bien que leur clientèle se recrute en Amérique du Nord, les Kaezar ambitionnent de percer dans leur pays d’origine. Comme première étape, ils ont chargé leur père d’ouvrir un bureau de liaison à Alger et un cousin de faire autant à Setif.
L’objectif ? Proposer leurs services, que ce soit en décoration intérieure ou en art corporatif aux hôtels, entreprises, cliniques et autres institutions ou ministères «à des prix compétitifs et avec une qualité canadienne», insiste Adlan.
Le succès sera certainement au rendez-vous. Car ils sont habitués aux défis. Le premier a été de reprendre tout à zéro au Canada. «L’immigrant a tort par défaut. La première question qu’on lui posera sera pourquoi il est venu ? Il n’aime pas son pays ? Et si son pays n’est pas bien, donc lui aussi n’est pas bien !», explique le président de Kaezar Vision pour schématiser la position dans laquelle se trouve un immigrant au début de son aventure.

Pour accéder à l’élite, il faut soit faire de longues études ou travailler dans des endroits où s’amuse et ou s’habille cette même élite.
Pendant ses études en communication à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Adlan a travaillé chez Boss. «J’ai réussi à avoir un carnet d’adresses enviable», explique celui qui s’habille toujours chez son ancien employeur. Anis, qui a travaillé dans un endroit où il a vu passer des stars comme Madonna, Jude Law ou Angelina Jolie, ajoute que «tout ce monde-là, avec tout le talent qu’ils ont certes, sont des être humains ordinaires, mais qui savent travailler et s’occuper de leur image.»
 
Samir Ben

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